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qui avait concouru à la préparation des lois de finances de cette époque, déclare positivement que le législateur de 1790 avait entendu faire de la contribution foncière un impôt de quotité.

Dans un savant rapport sur les projets de loi du 23 mars 1876, présenté à l’assemblée générale du conseil d’état, M. le président Du Martroy a analysé en termes clairs et concis l’opinion de M. le duc de Gaëte sur ce point[1].

« M. le duc de Gaëte, dit-il, en cherchant à constituer la contribution foncière sous la forme d’un impôt de quotité, entendait se conformer à l’esprit et revenir à l’exécution de la loi du 1er décembre 1790, sainement interprétée. L’assemblée constituante en établissant la contribution foncière avait voulu copier l’impôt des vingtièmes, le moins impopulaire des impôts de l’ancien régime, et qui était un impôt de quotité. Cette contribution dont le montant, déterminé à l’avance, devait être réparti entre les départemens, avait bien certains caractères de l’impôt de répartition ; mais il en était ainsi parce que, les revenus territoriaux de la France n’étant pas encore connus d’une manière certaine, et d’autre part, l’impôt foncier étant la principale branche des revenus publics, il fallait bien assurer d’avance la somme nécessaire pour les besoins du budget. Mais ce n’est que d’apparence et provisoirement que ce caractère avait été donné à l’impôt foncier; l’assemblée entendait si bien établir un impôt de quotité qu’elle a reconnu à tout contribuable taxé au delà du sixième de son revenu, le droit d’obtenir une réduction, et d’autre part, pour remédier aux inconvéniens de cette répartition provisoire, elle a prescrit la confection d’un cadastre général parcellaire en vue d’estimer individuellement en quelque sorte le revenu de chaque parcelle de propriété. Supposons, disait M. le duc de Gaëte, que le revenu cadastral de la France soit évalué à 150 millions, et que la législature veuille fixer à 15 millions le contingent de l’impôt foncier, la loi de finances n’aura qu’à disposer que chaque contribuable paiera 10 pour 100 de son revenu imposable, et alors, plus de répartition à faire par la loi entre les départemens, et par les conseils généraux et d’arrondissemens entre les arrondissemens et les communes. La contribution foncière devient un impôt de quotité, en ce que chaque contribuable paie isolément une partie aliquote de son revenu, la même pour tous. »

La loi du 15 septembre 1807, rendue sous le ministère du duc de Gaëte, avait commencé à mettre ce système à exécution ; elle en était l’exacte application. Mais, après la chute de l’empire, le mode de quotité fut abandonné, plutôt peut-être par esprit de réaction

  1. Rapport de M. Du Martroy, p. 26 et suiv.