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C’est ainsi que la circulation a lieu chez l’homme et chez tous les animaux à sang chaud. Chez les animaux à sang froid, comme le cœur est construit sur un type un peu différent, il y a aussi quelque différence dans le circuit du sang. Mais le principe est toujours le même : c’est toujours un organe d’impulsion, le cœur, qui, recevant sans cesse le sang, le chasse sans cesse dans les différentes parties du corps.

Nous allons voir comment, pour arriver à ces notions élémentaires, les savans de tous les âges ont dû accumuler une somme colossale d’erreurs.

II.

Voyons d’abord ce que pensaient les anciens.

Il ne nous reste guère des ouvrages physiologiques de l’antiquité que les écrits de trois grands hommes, Hippocrate, Aristote et Galien. Mais, quoique ces trois écrivains soient à peu près égaux par le génie, leur œuvre n’a pas dans l’histoire de la circulation une importance égale. Hippocrate était avant tout médecin ; Aristote, naturaliste ; Galien, anatomiste et physiologiste. Hippocrate traite surtout de l’art de guérir, des épidémies, des symptômes, des causes, des terminaisons des maladies. Il ne fait ni expériences, ni dissections, mais se contente d’observer des malades et de consigner dans ses écrits les précieux résultats de son observation et des vieilles traditions médicales. Aristote, dont le vaste génie avait embrassé tout ce que la nature ou la société présentent à l’intelligence humaine, étudie les animaux, leurs mœurs, leurs moyens de vivre, et la structure de leurs organes. Quant à Galien, il est probablement le premier qui ait institué de véritables expériences. Le premier, il affirme et prouve que l’art de guérir doit être appuyé sur la connaissance de la structure et des fonctions des organes ; aussi fait-il de l’anatomie, disséquant des singes, des porcs, des chiens, et appliquant à la structure du corps de l’homme ce que ses dissections lui ont appris sur la structure du corps des animaux. Non-seulement il fait de l’anatomie, mais encore il fait de la physiologie expérimentale. D’après lui tous les organes ont une fonction, un rôle, une utilité, et cette utilité peut se connaître de deux manières, d’une part par la disposition des parties, d’autre part par l’expérimentation. Aussi Galien a-t-il fait de nombreuses expériences (sur la moelle, — sur les nerfs laryngés, — sur les artères), devançant son époque, et donnant un exemple qui n’a été suivi que bien plus tard. Il a réellement créé la physiologie, comme Hippocrate la médecine, et Aristote l’histoire naturelle.