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« Le principe de la liberté appliqué à l’enseignement est une des conséquences promises par la charte. Nous vous avons proposé, en 1833, de le réaliser pour l’instruction primaire, et l’œuvre est accomplie. Nous venons aujourd’hui vous proposer d’introduire aussi ce principe dans l’enseignement secondaire, où il doit avoir une plus grande portée. » Ces fortes prémisses ainsi posées, M. Guizot en faisait découler l’obligation de soustraire les établissemens privés aux trois conditions qui les régissaient dans l’organisation de 1808 : la nécessité d’une autorisation spéciale et discrétionnaire, l’obligation pour les établissemens privés d’envoyer leurs élèves aux classes des collèges royaux, enfin le droit pour le grand maître de l’Université de retirer les autorisations après une enquête académique. Ces trois conditions, pensait M. Guizot, détruisaient, en principe au moins, toute liberté. En conséquence, il proposait d’y substituer les dispositions suivantes :

1° Droit pour tout Français âgé de vingt-cinq ans au moins et n’ayant encouru aucune des incapacités prévues par la loi de 1833, de former un établissement d’enseignement secondaire, sous la condition de déposer entre les mains du recteur : 1° un brevet de capacité délivré par un juge spécial; 2° un certificat de moralité délivré par le maire ; 3° le règlement intérieur et le programme d’études de l’établissement projeté; 4° le plan du local choisi pour l’institution et la pension.

2° Obligation pour les aspirans au brevet de capacité de chef d’institution de produire, soit les diplômes de licencié ès lettres et de bachelier es sciences, soit celui de licencié ès sciences ; obligation pour les aspirans au brevet de capacité de maître de pension de produire le diplôme de bachelier es lettres.

Enfin, pour compléter ce système de garanties préventives par un système de surveillance et de répression efficace, M. Guizot proposait de soumettre les établissemens privés à l’inspection de l’état, représenté par le corps universitaire. Un article spécial réglait d’une façon générale l’exercice de ce droit, qui ne comportait dans la pensée du gouvernement d’alors aucune restriction ni réserve. Un autre article fixait la procédure à suivre en cas d’infraction ou de refus d’obéissance de la part des chefs de pension, et déterminait les pénalités ainsi que la juridiction chargée de les appliquer.

Ces dispositions nous paraissent singulièrement compliquées aujourd’hui, et l’on comprend qu’elles aient soulevé de vives réclamations. L’opinion libérale ne put s’empêcher d’y voir un luxe de précautions et de garanties peu compatibles avec le principe même qu’il s’agissait d’introduire dans la loi. « Pourquoi, dirent les adversaires du projet, toutes ces barrières superposées, échelonnées? Pourquoi cette obligation d’un brevet spécial ajouté à celui des