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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars 1879.

Il faudrait cependant bien savoir où l’on va, ce qu’on veut, ce qu’on entend décidément faire de ce régime nouveau qu’on a sans doute l’intention d’organiser pour la durée et auquel on prépare d’inévitables mécomptes, peut-être d’irréparables échecs.

Depuis que la république est affranchie ou censée affranchie par la transformation de tous les pouvoirs, depuis deux mois bien comptés, que se passe-t-il ? Le spectacle est certainement étrange et aussi inquiétant qu’étrange. Il y a partout des velléités, des impatiences de domination, des représailles, des infatuations, des défis, des confusions, il y a l’étourdissement, peut-être l’embarras du succès, il n’y a pas de politique. Il n’y a pas, entendons-nous, une vraie politique, précisée avec autorité par un gouvernement libre dans sa pensée et dans son action, soutenue avec suite par une majorité parlementaire coordonnée et définie, inspirée d’un sentiment impartial et supérieur des grandes réalités nationales. Voilà ce qu’il n’y a pas ! — C’était, objectera-t-on, un premier trouble inséparable de tels changemens, d’une transition si grave. Il fallait bien entrer en possession, s’établir dans l’ordre nouveau, s’assurer les fruits de la victoire et surtout liquider le passé. C’est possible. Il aurait fallu aussi apparemment, et ce n’était point impossible, éviter de se perdre dans cette liquidation, dans des diversions inutilement agitatrices, s’abstenir de multiplier les occasions de crises, les difficultés autour d’un gouvernement inauguré de la veille, préférer les affaires aux excitations vaines et périlleuses. La vérité est que depuis deux mois rien n’a été fait d’une manière sérieuse pour les. plus pressans-intérêts du pays, et qu’à l’heure où nous sommes, après huit ou dix semaines, à la veille des vacances de Pâques, on songe à peine à se