Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 32.djvu/594

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais, encore une fois, on pourrait instituer deux épreuves au lieu de l’épreuve unique actuelle. Nos facultés des lettres recruteraient ainsi toute une catégorie d’élèves qui désertent aujourd’hui leurs amphithéâtres.

Telles sont, avec une meilleure organisation des bibliothèques de facultés, les principales réformes que semble comporter actuellement notre enseignement supérieur. Au résumé, ces réformes ne sont ni bien nombreuses ni bien compliquées, et l’on ne voit pas trop ce qui a pu jusqu’ici les faire ajourner. Ce n’est pas en effet d’aujourd’hui que la plupart d’entre elles sont à l’étude. On le rappelait au début de ce travail, il y a près de dix ans qu’un ministre sorti des rangs universitaires en saisissait l’opinion publique et les traduisait en projets de loi dont les chambres allaient aborder la discussion quand la guerre éclata. Depuis sont intervenus vingt travaux, livres, brochures ou articles qui ont avancé la question en la précisant et qui l’ont portée à son plus haut point de maturité. Tout ce qui n’était qu’illusion ou expédient, nouveautés dangereuses et généralités est à l’heure actuelle abandonné. On a étudié des faits, constaté des résultats, établi des comparaisons, examiné tous les systèmes et tous les régimes en vigueur dans les autres pays : une grande quantité d’observations ont été notées ; les enquêtes officielles et privées sur la France et l’étranger abondent. Bref tous les matériaux de construction ont été réunis ; il ne reste plus qu’à les mettre en œuvre, dans un rapport harmonique et proportionnel à notre vieil édifice universitaire. Que les pouvoirs publics se hâtent donc. Ce n’est pas assez de proclamer que la république est entrée dans sa période organique ; il lui importe de montrer qu’elle est capable d’organiser ; ce ne sont pas des formules plus ou moins scientifiques qu’on lui demande, ce sont des actes. Qu’elle prouve le mouvement en marchant, cela vaudra mieux que de s’épuiser à tourner sur elle-même dans le cercle vicieux d’une agitation sans fin.

Sans doute, on ne se flatte pas que ces réformes puissent, du jour au lendemain, communiquer à tous nos établissemens une activité et une vie nouvelles. C’est insensiblement que le bienfait s’en ferait sentir. Mais plus la cure doit être longue, plus elle demande de patience et d’efforts continus, plus tôt il importe de l’entreprendre et d’y persévérer. Car ce qui a le plus manqué depuis dix ans à l’Université, c’est la suite et l’unité de direction. Ballottée d’un extrême à l’autre, tantôt poussée en avant, tantôt ramenée en arrière, jamais en repos, jamais assurée du lendemain, suivant toutes les fluctuations et servant d’enjeu dans toutes les combinaisons de la politique, elle a passé par toutes les épreuves et par toutes les