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Dans ce même ordre d’idées se présente une question que la statistique a fort bien fait de soulever et que les pouvoirs publics devraient bien trancher, autrement elle ne le sera jamais : la question de la durée des cours et du nombre des leçons. Autrefois les cours de facultés étaient annuels, c’est-à-dire de huit à neuf mois, et les leçons étaient au nombre de trois et quatre par semaine. Les professeurs étaient même tenus de faire subir des interrogations aux élèves et de leur corriger des devoirs. Bref les cours de nos facultés des sciences et des lettres étaient comme le complément des études du lycée (décret du 16 février 1810). Ils avaient si bien ce caractère que le statut général du 9 avril 1825, commun à toute l’Université, disposait que les élèves inscrits et des auditeurs bénévoles munis de cartes seraient seuls admis dans les amphithéâtres. Aujourd’hui la durée des cours s’abaisse fréquemment à quatre ou cinq mois au plus, grâce aux congés et aux sessions d’examen pendant lesquels ils vaquent ; le nombre des leçons a été réduit à deux par semaine, en vertu d’une ordonnance de 1841 ; les auditoires de nos facultés, au lieu d’être exclusivement composés d’élèves inscrits et d’auditeurs bénévoles munis de cartes, forment une véritable macédoine ; enfin l’usage des interrogations et des corrections de copies s’est complètement perdu. Nous parlons, bien entendu, des seules facultés des sciences et des lettres, car dans les facultés de droit et de médecine et dans les écoles supérieures de pharmacie, la pratique des trois leçons n’a jamais été abandonnée. Convient-il de laisser les choses en l’état ? Vaut-il mieux revenir à l’ancien régime ou tout au moins s’en rapprocher ? Dans la pensée de l’administration, dans celle de beaucoup d’hommes compétens, il n’est pas douteux que le nombre des leçons et la durée des cours soient devenus complètement insuffisans. Ce n’est pas avec trente ou quarante leçons par an qu’un professeur de littérature ou d’histoire peut donner aux sujets qu’embrassent généralement nos cours d’enseignement supérieur tout le développement qu’ils comportent. Sans doute un habile homme n’a pas besoin d’un plus long temps pour tracer à grands traits le tableau d’une époque ou d’un genre. M. Guizot n’a pas mis plus de cinquante séances à parcourir les étapes successives de l’histoire de la civilisation en France, et M. Villemain a su faire tenir toute la littérature du XVIIIe siècle en soixante-deux leçons. Mais outre que les Guizot et les Villemain sont rares, les progrès de la critique historique et littéraire ont complètement modifié le caractère et les procédés d’enseignement. Il ne serait plus permis aujourd’hui, même aux plus grands talens, de parcourir de si vastes espaces et de s’en tenir à ces généralités qui ont eu tant de succès il y a quarante ans ; nous sommes devenus plus exigeans. Le champ de la