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été créés ; il nous est donc permis de croire que, si le public peut continuer de trouver dans les leçons ouvertes à tous un emploi salutaire de ses loisirs, les élèves des établissemens de l’état trouveront de leur côté dans les exercices d’un caractère plus intime les ressources spéciales et les encouragemens qui leur sont si légitimement dus. » Ces ressources étaient en effet ce qui manquait le plus aux étudians sérieux dans l’ancien état de choses, et c’est à les développer que l’administration a compris qu’elle devait mettre tous ses efforts. Quand toutes nos facultés des sciences seront pourvues de laboratoires, quand les exercices pratiques auront pris dans nos facultés des lettres toute l’extension désirable, le dernier mot ne sera pas dit sans doute ; il restera encore à trouver le moyen d’augmenter le nombre beaucoup trop restreint des jeunes gens qui suivent les cours d’enseignement supérieur avec la pensée de conquérir leurs grades ; mais un grand pas aura été fait, et si nos facultés continuent de n’attirer que des auditeurs de passage, du moins on ne pourra pas reprocher au gouvernement de n’avoir pas été jusqu’au bout de son devoir.


III

L’énumération qui précède était indispensable pour donner aux lecteurs une idée de la situation de notre enseignement supérieur, mais on n’a pu qu’y effleurer en passant quelques-unes des questions qui intéressent l’avenir des hautes études en France. Il nous faut maintenant pour compléter ce travail aborder ces questions. Même après les travaux distingués qui ont paru tout récemment encore dans la Revue[1], le sujet ne semble pas épuisé, et peut-être trouvera-t-on qu’il comportait de nouveaux développemens.

On a vu plus haut que la loi du 12 juillet 1875 avait prévu que le gouvernement présenterait, dans le délai d’un an, un projet de loi ayant pour objet d’introduire dans l’enseignement supérieur de l’état les améliorations jugées nécessaires. Par cette disposition pleine de prévoyance, le législateur tenait sans doute à marquer qu’il n’entendait pas livrer l’Université sans défense aux coups de ses adversaires émancipés. En même temps qu’il donnait à ceux-ci la liberté, il était naturel qu’il invitât le gouvernement à se préoccuper des moyens de mettre nos établissemens en mesure de supporter la concurrence. Mais le législateur de 1875 avait compté sans la politique et ses vicissitudes. Depuis le vote de la loi sur la liberté de l’enseignement supérieur, cinq ministres appartenant aux écoles et aux doctrines les plus diverses se sont succédé rue de Grenelle.

  1. Voir l’étude de M. Michel Bréal dans la Revue du 15 décembre 1878.