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l’aridité d’exercices purement scientifiques. Pour le retenir et l’intéresser, nos maîtres sont obligés de sacrifier beaucoup à la forme. C’est presque une nécessité pour eux de donner à leurs leçons un tour élégant, spirituel ; quelques-uns cultivent la grande éloquence et s’y montrent les dignes successeurs des Saint-Marc Girardin et des Cousin. Ces traditions certes ont leur bon et beau côté, et celui qui les voudrait voir disparaître se montrerait bien peu soucieux de notre vieille renommée littéraire. Si nous avons encore une supériorité, c’est assurément celle du beau langage ; sachons nous en montrer jaloux. Mais à côté de ces leçons oratoires, plus faciles à critiquer qu’à faire et que l’envie seule voudrait supprimer, il convenait d’encourager et de multiplier les leçons didactiques, celles qui ne retiennent pas le public, mais qui forment des élèves. L’auteur de la statistique de 1868 avait ouvert la voie par la création de l’École des hautes études, si critiquée au début, aujourd’hui en pleine prospérité. Il pensait qu’à côté des professeurs ordinaires, il fallait placer, comme dans les universités allemandes, le privat-docent, autrement dit le chargé de cours complémentaires ou le maître de conférences. Le gouvernement en demandant les crédits nécessaires à l’établissement de ces nouveaux enseignemens, la chambre en les votant, n’ont fait que réaliser cette pensée.

On en peut dire autant de la nouvelle organisation de l’École des langues orientales vivantes. Destinée dans le principe à préparer des sujets pour nos ambassades, nos légations et nos comptoirs, cette école s’était complètement écartée des intentions du législateur. Elle avait fini par se persuader qu’elle avait été créée exclusivement pour former des lettrés. Les professeurs y faisaient des cours fort savans, mais la langue parlée n’était plus sérieusement enseignée ; l’abus était tel, que nous en étions presque partout réduits à emprunter le secours d’agens étrangers. Un décret rendu le 8 novembre 1869 avait déjà ramené l’école à l’esprit de son institution, en plaçant des répétiteurs indigènes à côté des professeurs titulaires et en établissant des examens de sortie qui permettent de constater le degré d’instruction, des aspirans au diplôme d’élève breveté. Depuis, de nouvelles et importantes améliorations ont été réalisées sous la même forme que dans nos facultés : c’est-à-dire sous la forme de création de chaires et de cours complémentaires où dominent les exercices pratiques. Quant à l’installation matérielle, elle a été complètement changée. L’École des langues orientales, qui avait autrefois pour unique local une salle de la Bibliothèque nationale, possède aujourd’hui rue de Lille un immeuble important.

L’École des langues orientales n’avait besoin que d’être