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insinués par le cardinal, pour réaliser, les deux autres millions, ils décidèrent qu’ils prieraient le roi de vouloir bien y renoncer ou, s’il persistait, d’indiquer lui-même les voies pour obtenir la somme. Ils se flattaient du succès de la démarche, sachant que Louis XIII n’avait eu dans le principe l’idée que de tirer du clergé 1,200,000 écus, que c’était en prévision que l’assemblée n’accorderait pas autant, qu’il demandait qu’il avait élevé le taux de la subvention, à 6 millions de livres. Cette espérance fut déçue. Le roi persista à réclamer les deux millions et fit dire à l’assemblée que c’était à elle à découvrir comment ils pourraient être réalisés. La réponse était conçue en des termes tels qu’elle ne souffrait pas de refus. L’assemblée dut donc s’exécuter et s’occuper des moyens de trouver une si forte somme. Diverses propositions furent faites et successivement repoussées. Enfin l’on s’arrêta à l’établissement d’un droit du huitième denier sur les biens aliénés, quoique on eût déjà par le passé maintes fois écarté pareille mesure. On ne voyait rien de moins onéreux à imaginer ; mais, comme on comprenait que cela ne pouvait donner deux millions de livres, on décida, pour parfaire la somme, de réduire du denier douze au denier quatorze le supplément de gages qui avait été attribué en 1635 aux officiers du clergé. Il fut résolu en outre qu’on prendrait avec les traitans certains arrangemens de nature à ménager au profit du clergé la rentrée de fonds qu’on comptait aussi affecter au paiement des deux millions en question. Malheureusement ces arrangemens ne faisaient pas le compte des hommes de finances, qui manœuvrèrent de façon à les faire repousser par le gouvernement, dont on avait obtenu l’agrément pour les deux autres expédiens. En rejetant les arrangemens proposés avec les traitans, le conseil du roi voulait obliger l’assemblée à en passer par la vente de la recette générale du clergé. Richelieu y tenait beaucoup parce qu’elle aurait eu pour conséquence de faire définitivement de cette charge un office de la couronne ; celui qui en aurait été ainsi pourvu se serait trouvé entièrement sous la main du ministre, auquel il eût été alors facile de connaître exactement le chiffre des revenus ecclésiastiques ; or, c’est ce que le clergé redoutait fort parce qu’il savait qu’on s’en servirait pour lui demander davantage. Aussi, malgré les instances qui lui étaient faites, l’assemblée persista à ne point recourir à un tel expédient. Le gouvernement se mit alors en devoir de la contraindre, et les commissaires royaux lui vinrent déclarer que, si elle s’obstinait à ne point accepter la vente de la recette générale, le roi se verrait obligé de surimposer tous les bénéficiers jusqu’à concurrence de ce qui manquerait des 6 millions, défalcation faite du produit approximatif des deux autres mesures adoptées, à savoir le