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éclater une division qui affaiblissait l’autorité que pouvaient prendre les états-généraux. Cependant le tiers, qui s’effrayait à l’idée d’un schisme, hésitait à s’engager dans la voie où le poussait son président Robert Miron. Plus résolu dans son hostilité au clergé, le parlement chercha à s’emparer de l’affaire et rendit un arrêt qui déclarait les maximes gallicanes au-dessus de toute controverse. Le conseil du roi, voyant que la querelle s’envenimait et en vue d’empêcher un conflit dangereux, évoqua la cause. Le clergé, profitant habilement de ce que le tiers se sentait quelque peu blessé de l’intervention du parlement, exhortait cet ordre à protester contre l’ingérence de la haute cour. Il s’efforçait de faire purement et simplement supprimer l’arrêt pour ne pas laisser juger la question par le conseil qui avait évoqué l’article du cahier et l’arrêt en des termes dont il n’était nullement satisfait. Il y eut de la part des députés des deux ordres privilégiés redoublement de sollicitations près de la reine mère ; ils en obtinrent une ordonnance enjoignant au tiers de ne point insérer dans son cahier l’article qui soulevait tant de réclamations. Les députés du tiers n’étaient pas d’accord sur l’attitude à prendre. Une délibération fort agitée eut lieu, et ceux qui se rangeaient à l’autorité du roi enlevèrent un vote favorable à ce qu’avait proposé le clergé. Le premier ordre de l’état l’avait donc encore une fois emporté sur le pouvoir laïque ; il avait empêché des résolutions de nature à compromettre ses immunités, car la proclamation de l’indépendance absolue de la couronne à l’égard du saint-siège eût amené l’ingérence de l’autorité civile dans tout ce qui touchait au temporel de l’église gallicane. Le clergé sortit de la sorte des états-généraux de 1614 politiquement plus fort qu’il n’était auparavant, et dans son assemblée particulière de 1617 il obtint le rétablissement des droits de l’église catholique en Béarn et la restitution des biens qu’elle y avait possédés.

En retour de l’appui qu’il trouvait près du trône contre les revendications de l’autorité laïque, le corps sacerdotal dut lui prêter un concours pécuniaire plus en rapport avec ses immenses revenus. Les dépenses de la couronne s’étaient prodigieusement accrues par les grandes entreprises qu’elle poursuivait. Louis XIII avait à soutenir la guerre contre les calvinistes ; il était certes bien fondé à réclamer du clergé des subsides extraordinaires pour en assurer le succès, tous les coups qu’il portait aux religionaires ne relevaient-ils pas d’autant la puissance de l’église catholique mise en péril par les efforts de l’hérésie. Les assemblées du clergé qui suivirent les états-généraux de 1614 auraient donc été mal venues à repousser les demandes que leur adressait le roi. D’ailleurs, une fois Richelieu arrivé au ministère, elles en subirent l’ascendant. Le cardinal