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réclamait partout, tant les abus dont souffrait l’église étaient grands, tant les ecclésiastiques donnaient l’exemple de scandales ; mais le clergé entendait accomplir lui-même sa propre réforme, ainsi qu’on avait pu s’en apercevoir par son attitude aux états-généraux d’Orléans. La noblesse et surtout le tiers trouvaient au contraire qu’il fallait imposer au clergé des sacrifices, des mesures radicales ; ils prétendaient faire dicter par les états les changemens à apporter dans la constitution temporelle de l’église. C’est dans ce sens qu’avaient été rédigés les cahiers de Pontoise, que l’orateur choisi par le tiers pour porter la parole devant le roi, De Bretaigne, premier magistrat (vierg) d’Autun, développa avec énergie ; il s’éleva contre les désordres du clergé, sans se soucier de la présence de quelques évêques qui étaient venus de Poissy à Saint-Germain pour assister à l’audience royale. Les états de Pontoise demandaient un concile national, la suppression des juridictions ecclésiastiques et la liberté des assemblées pour les réformés sous la surveillance de l’autorité ; ils exprimaient le vœu que la dette publique fût rachetée avec les biens du clergé, et pour y arriver on proposait, entre autres moyens, l’établissement d’un impôt progressif sur les revenus des bénéficiers. Quelques députés avaient même demandé une vente générale des biens de l’église, dont on aurait fait trois parts, l’une pour l’entretien du culte, l’autre pour le rachat de la dette, et la troisième pour constituer des prêts aux villes et aux provinces, afin de permettre d’entreprendre de grands travaux d’utilité publique.

De telles demandes accusaient chez les députés des états de Pontoise des tendances qui étaient bien faites pour donner à réfléchir au clergé ; aussi le gouvernement de la régente saisit-il ce moment pour presser les prélats de s’engager envers l’état à un subside plus large que celui que leur ordre avait auparavant accordé. Mais, comme c’était à Poissy que les représentans du clergé se trouvaient réunis pour le fameux colloque, où ils s’étaient rendus en plus grand nombre qu’ils ne figuraient aux états d’Orléans, le gouvernement royal s’adressa à cette réunion. Il s’agissait de payer un arriéré de dettes considérable. Le clergé en délibéra ; il ne se refusa pas à assister le roi, mais il proposa un subside dont le recouvrement offrait peu de garantie et ne pouvait être complètement opéré qu’après un nombre assez prolongé d’années. La régente n’accepta pas cette transaction, car les commissaires de son conseil entendaient fixer la somme à fournir par le corps ecclésiastique et assigner le délai dans lequel elle devait être acquittée. On réclamait 15 millions payables en six ans, par annuités de 2 millions et 1/2. La somme était destinée au rachat de la partie du domaine, des aides et des gabelles que le