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confident. La conspiration de 1808 avait été sans conteste une entreprise républicaine. Le sénatus-consulte rédigé à cette époque par Malet, de concert avec Demaillot et Bazin, ne s’était pas contenté d’abolir les institutions impériales et de proclamer la déchéance de l’empereur et de sa « ridicule » dynastie ; il rétablissait expressément la république et formait un gouvernement provisoire exclusivement composé de républicains. Rien de pareil dans le sénatus-consulte de 1812 ; aucun signe, aucune marque de fabrique républicaine, le mot même de république ne s’y rencontre nulle part, et vraiment pour le sous-entendre il faut trop de bonne volonté. Au contraire, en examinant de près cet étrange document, on y sent percer à tout moment sous de savantes réticences le bout de l’oreille royaliste. Le roi n’est pas nommé, la royauté non plus ; cependant on les devine, ils sont là invisibles, mais présens ; tout les annonce et les trahit : et d’abord en premier lieu la composition même du gouvernement provisoire. Que font là M. le duc Mathieu de Montmorency et M. le comte Alexis de Noailles ? Apparemment ils ne conspirent pas le rétablissement de la république. Pourquoi leur a-t-on adjoint le préfet de la Seine, comte Frochot ? Celui-là n’a jamais, que l’on sache, passé pour un révolutionnaire. S’il figure au nombre des membres du gouvernement provisoire, ce n’est certes pas au titre républicain. C’était un homme d’antichambre auquel il fallait pour briller une cour et pour servir un maître. Il était acquis d’avance à la restauration. Et Moreau ? Qui croyait encore en 1812 au républicanisme du futur général de la coalition ? Les rois l’avaient choisi pour porter les derniers coups à Napoléon. S’il ne fût pas mort, trop tard pour sa gloire, il eût conquis à Waterloo son bâton de maréchal de France. Tels sont les hommes que Malet se serait associés pour rétablir la république. En vérité ce serait la première fois qu’on aurait vu tant de royalistes dans une entreprise républicaine, et l’on peut difficilement admettre qu’il n’y ait eu là de la part de Malet qu’une concession habile aux exigences du parti dont l’abbé Lafon lui avait apporté le concours.

Il faut croire en tout cas que ces exigences furent singulièrement impérieuses, car elles ne se bornèrent pas à l’introduction d’un élément royaliste dans la composition du gouvernement provisoire. Le sénatus-consulte de 1812, à la différence du premier, réservait absolument la forme du gouvernement. Son article 6 était ainsi conçu : « Le gouvernement fera présenter le plus tôt possible un projet de constitution à l’acceptation du peuple français réuni en assemblée primaire. »

Enfin que penser des articles 7 et 13 ? le premier relatif « à l’envoi d’une députation à sa sainteté Pie VII, pour le supplier au nom