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coudée du premier arrivait juste à 50 centimètres, tandis que l’autre dépassait de trois ou quatre ; la démonstration ne pouvait être plus concluante.

La mesure de capacité est le daoula, qui équivaut à 200 litres environ et varie, selon les pays, de 10 à 40 litres en plus ou en moins. M. Arnoux n’eut pas de peine à démontrer au roi les avantages du litre comme il l’avait fait pour le mètre. Quant à l’unité de poids introduite en Ethiopie par les marchands musulmans, c’est le rotoli ; 10 ou 12 rotolis, suivant la contrée, forment un ferossola ; le rotoli est au Choa de 450 grammes, poids net de 18 talaris de Marie-Thérèse, mais à Massaouah il n’en vaut que 16, et 14 seulement en d’autres endroits. Le café est vendu sur le marché de Rogué à la mesure du daoula ; dans le Choa, il se vend au rotoli, la cire également ; l’ivoire seul se pèse par okiés de 40 rotolis équivalant à 18 kilogrammes.

M. Arnoux s’était muni en partant d’Europe d’une romaine et d’une balance pour peser l’or et la monnaie ; il avait apporté aussi un certain nombre de pièces d’or, d’argent et de bronze. Il expliqua au roi que quarante pièces de 5 francs pèsent 1 kilogramme, que, chaque pièce pesant 25 grammes, cela faisait 1,000 grammes, que 1,000 grammes ou 1 kilogramme sont chez nous l’unité de poids, et, se servant de la balance de précision, il lui en fit connaître les subdivisions ; il se mit ensuite à peser des marchandises avec la romaine en comptant par kilogrammes. Les chiffres étaient comparés à ceux donnés précédemment en rotolis par les magasiniers du roi et s’accordaient parfaitement, ce qui frappa vivement Minylik et toute l’assistance. Même Azadj Woldé Tsadek, grand maître du palais, s’étant fait aussitôt enseigner les chiffres français, ne voulut plus se servir que de la romaine pour faire les pesées que lui commandait sa charge.

Les anciens empereurs d’Ethiopie frappaient la monnaie à l’imitation des Byzantins. Aujourd’hui la seule monnaie usitée dans le pays est, chose bizarre, le talari, ou thaler d’argent à l’effigie de Marie-Thérèse d’Autriche. Ces talaris, valant environ 5 fr. 25 cent., sont frappés à Trieste et spécialement destinés au commerce de l’intérieur de l’Afrique où les importent les marchands juifs et musulmans. Dans les pays gallas, le talari est peu connu ; les trafiquans d’esclaves se procurent avec des étoiles, des verroteries, du sel et la quincaillerie commune la chair humaine volée sur les marchés et sur les routes par leurs coreligionnaires ; quant aux marchands de Gondar qui fréquentent Massaouah, leur commerce consiste principalement en ivoire, café, musc et poudre d’or ; c’est du sud qu’ils tirent ces riches produits, et le voyage des caravanes dure souvent un an ou deux : avant de se présenter, sur les marchés gallas, ils