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des centres nerveux ? Également par un travail de création de la cause vitale qui poursuit son œuvre, des cellules aux tissus organiques. Ici encore ce n’est point le concours des centres nerveux qui fait l’unité générale et centrale de l’être vivant ; c’est cette unité même qui préside à l’activité des centres nerveux, comme à l’activité des élémens cellulaires. Enfin, comment se produit, la diversité des organes cérébraux ? Toujours par le même travail de la cause qui engendre les cellules, les tissus, les organes de toute espèce.

Et à ce propos il n’est pas inutile de rectifier un langage fort usité dans le monde savant. Comme la physiologie a démontré que nos fonctions vitales ont chacune leur organe, on se croit autorisé à dire que c’est tel organe cérébral qui sent, tel autre qui pense, tel autre qui dirige les mouvemens dont l’initiative appartient à l’activité volontaire ou instinctive. C’est là une inexactitude d’expression que nous fait corriger une notion précise de la vie et de son principe. Sans vouloir invoquer ici le témoignage de la conscience qui ne permet point un pareil langage, nous nous bornons à faire remarquer qu’il est contraire aux enseignemens de la physiologie elle-même. Si nous considérons, non pas l’unité de la personne humaine révélée par le sens intime, mais seulement l’unité de la vie, telle qu’elle résulte de la définition de Claude Bernard, nous voyons que toutes les manifestations vitales relèvent d’un seul et même principe, la cause vitale. C’est donc elle qui pense, sent, veut, agit, vit, en un mot, par les organes qu’elle a engendrés et qu’elle conserve par une génération continuelle. Ici encore la physiologie, aide la psychologie à maintenir cette capitale vérité de l’unité de l’être humain, qui n’est contestée, malgré la révélation du sens intime, que parce qu’elle a l’air d’une abstraction métaphysique. La physiologie vitaliste nous la fait comprendre, en montrant qu’elle n’est seulement pas la loi de la vie humaine, mais encore de la vie animale tout entière. La vie est une partout ; chaque être vivant, à quelque degré de l’échelle zoologique qu’il soit placé, est un individu. Si l’homme seul peut dire moi, c’est que seul il a. la claire conscience de son individualité. Quand donc la psychologie persiste en face des affirmations de l’école mécaniste, à maintenir la distinction du moi et de l’organisme cérébral, siège des opérations mentales, elle est dans son droit, et la physiologie elle-même confirme cette distinction. La véritable unité de l’être vivant n’est dans aucun de ses organes ; c’est dans la cause vitale seule qu’il faut la chercher.

On ne saurait trop le répéter, si l’unité est partout, dans les cellules, dans les centres nerveux, dans les organes cérébraux,