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Ithaque la côte des Acamanes, sur laquelle s’élevait l’importante cité d’Astacos, Céphallénie et Zacynthe masquaient l’entrée du golfe de Corinthe. L’extrémité méridionale de Zacynthe s’arrêtait à la hauteur de l’Élide. Dès la première année de la guerre, les Athéniens chassèrent d’Astacos Évarque, le tyran des Acamanes, et firent entrer, s’appuyant là comme partout ailleurs sur la démocratie, ce pays belliqueux dans leur alliance. La possession d’Astacos leur donna sans combat celle de Céphallénie. Les Corinthiens profitèrent de l’hiver pour ramener, avec une flotte de quarante vaisseaux et mille cinq cents hoplites, le tyran Évarque dans ses états. Évarque reconquit ainsi la cité d’où les Athéniens l’avaient expulsé, il ne recouvra pas son ancien ascendant sur les sujets que les généraux ennemis s’étaient empressés d’affranchir. En dehors des murs d’Astacos, l’Acarnanie ne cessa pas de rester fidèle à la cause d’Athènes.

L’été venu, les Lacédémoniens, suivis de leurs alliés, se portèrent, à la tête de cent vaisseaux, sur Zacynthe. — Pourquoi n’appellerions-nous pas cette île, sans trop nous préoccuper de l’anachronisme, l’île de Zante ? On aura déjà reconnu Corfou dans Corcyre, Sainte-Maure dans Leucade, Céphalonie dans Céphallénie. De toutes les îles Ioniennes, Zante, qui avait dès le principe épousé la querelle de Corcyre et des Athéniens, était la plus menaçante pour le Péloponèse, car, séparée par un étroit canal de l’Élide, elle pouvait gêner considérablement les communications de cette province avec l’Italie. Zante repoussa les Péloponésiens. Athènes cependant s’émut de la tentative. Elle commençait à s’apercevoir que Lacédémone travaillait activement, grâce à l’aide de Corinthe, à se donner une marine. L’ordre fut expédié à Phormion, qui gardait Naupacte avec vingt vaisseaux, de bloquer étroitement pendant l’hiver le golfe au fond duquel se préparaient les arméniens du Péloponèse. Entendons-nous une fois pour toutes sur le nom de ce golfe. Le golfe de Corinthe des anciens était le golfe de lépante de nos jours. C’est sur l’emplacement de Naupacte que Lépante s’élève aujourd’hui. La partie orientale de ce long enfoncement qui va des Petites-Dardanelles jusqu’à l’isthme s’appelait, à l’époque qui nous occupe, le golfe de Crissa.

L’été de l’année 429 avant notre ère vit pour la première fois les Lacédémoniens déployer avec un certain éclat leurs forces navales. Leur but était toujours de s’emparer de Zante et de Céphalonie. Ils ne crurent pouvoir mieux faire pour arriver à ce résultat que de s’allier aux Ambraciotes et aux Chaoniens, toujours disposés à se jeter sur les terres de leurs voisins, les Acamanes. Figurons-nous les Tosques, ces farouches Albanais qui occupent encore la partie méridionale de l’Épire, se répandant des bords du golfe de l’Arta