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de nombreux diplômes, nous craignons cependant que pour beaucoup la première période de la carrière n’ait été sacrifiée. Où se recrutent les professeurs des collèges communaux ? En général parmi les maîtres répétiteurs[1]. Il importe d’ouvrir à ces maîtres répétiteurs quelques-unes des occasions d’apprendre qui jusqu’à présent n’ont guère existé que pour une minorité du personnel. Les lycées eux-mêmes contiennent un grand nombre de professeurs qui n’ont pas été plus heureux. Sur 2,349 membres du personnel enseignant des lycées, 1,482 seulement ont un titre supérieur à celui de bachelier[2]. Dans le corps universitaire, les élèves sortis de l’École normale n’ont donc jamais formé qu’une élite. M. Bersot, le spirituel et respecté directeur de l’École, l’a appelée un ferment. Nous le voulons bien ; mais il ne sera pas inutile de s’occuper un peu de la matière à fermenter. Entre ceux à qui l’on prodigue l’instruction, les moyens de travail, les stimulans de toute sorte, et ceux qui se forment au hasard ou à force d’énergie, la différence est trop grande. Nous retrouvons ici l’idée qui au régiment mêle aux officiers venus des écoles les officiers sortis de la troupe. Assurément les uns et les autres ont leur mérite, mais puisque le gouvernement crée aujourd’hui des écoles de sous-officiers, personne ne s’étonnera que l’université multiplie les occasions de s’instruire pour les hommes de bonne volonté qui servent dans ses rangs.

Les facultés des lettres et des sciences existent pour donner cette instruction ; mais pendant longtemps leurs rapports avec les membres de l’enseignement secondaire sont restés limités aux jours d’examen, c’est-à-dire que les facultés constataient l’instruction, mais ne la donnaient pas. La situation commence à changer depuis que les chambres ont mis à la disposition du ministre une somme importante pour des bourses auprès des facultés. Ces bourses sont attribuées, après concours, à des jeunes gens ayant pris l’engagement de se vouer à l’instruction publique ; non-seulement le personnel universitaire sera plus instruit, mais ces boursiers, justement exigeans, feront bientôt changer le caractère des leçons. La mesure est excellente ; il faudrait seulement aux bourses de licence joindre des bourses d’agrégation, que le législateur, par un oubli évident, n’a pas nommées dans la loi. A mesure que ces jeunes gens, après

  1. En 1876, 220 maîtres ou aspirans répétiteurs ont été appelés à de nouveaux emplois, sur lesquels 105 ont été envoyés dans les collèges communaux, 31 ont été délégués dans les classes de septième et de huitième, 19 ont été chargés de cours dans ses lycées.
  2. Nous ne parlons pas ici de l’armée des maîtres et aspirans répétiteurs, au nombre de 1,597 sur lesquels 1,468 sont simplement bacheliers ou dépourvus de tout grade.