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A MONSIEUR BULOZ, DIRECTEUR DE LA Revue des Deux Mondes.

Monsieur,

Le numéro du 1er septembre courant renferme un article de M. Maxime Du Camp, « le Louvre et les Tuileries pendant la commune, » qui me fait jouer up rôle odieux et absolument contraire à la vérité.

M. Du Camp paraît ignorer et laisse ignorer à vos lecteurs que, loin d’avoir jamais cherché à me soustraire aux conséquences d’une action judiciaire, je l’avais au contraire provoquée par écrit en offrant de me constituer prisonnier.

M. Du Camp parait ignorer et laisse encore ignorer à vos lecteurs que trois ans après les événements de la commune, je fus arrêté à mon domicile de Paris que je n’avais point quitté, que je fus détenu préventivement pendant un mois à la prison du Cherche-Midi, et qu’enfin le 1er mai 1874, jour de l’ouverture du salon, comme le fit observer ironiquement l’officier faisant fonction d’avocat général, je comparaissais seul de tous les artistes ayant fait partie de la fédération et de ses délégations devant le 3e conseil de guerre ; qu’après une éloquente plaidoirie de M. Albert Liouville, avocat à la cour d’appel, vice-président du conseil municipal de la ville de Paris, qui m’avait prêté le concours de son talent et de sa respectabilité, convaincu qu’il était que mon honneur sortirait sauf de ces débats, je fus condamné, tous les autres chefs d’accusation écartés, à six mois de prison pour immixtion dans des fonctions publiques.

Que, transféré à la prison cellulaire de la Santé, j’en suis sorti trois mois après, grâce à la généreuse intervention de trente de mes confrères.

Aujourd’hui que sept années ont passé sur ces douloureux événements, alors que tous les honnêtes gens s’efforcent d’en effacer les traces, lit. Du Camp semble vouloir me faire un nouveau procès dans la Revue des Deux Mondes.

Atteint dans mon honneur, dans ma considération, je proteste énergiquement devant cette nouvelle accusation et je viens vous donner la preuve que tout ce que M. Maxime Du Camp n’a pas craint d’affirmer sans prendre la peine de faire une instruction sérieuse n’est qu’un mélange d’inexactitudes graves et de faits déjà établis.

C’est ce que je vais faire, non avec des phrases ou des documents apocryphes, mais avec des citations que je le mets au défi de réfuter.

Son réquisitoire contre moi peut se résumer ainsi :

Des trois délégués, l’un n’avait accepté ses fonctions que dans l’intention nettement déterminée de protéger les employés et de sauver les collections. Il n’était pas l’homme qui convenait à la commune, car reculer devant une bassesse indiquait des sentiments d’un civisme peu exalté.

L’autre n’a laissé au Louvre aucun souvenir, il est resté neutre, ni bon ni mauvais.

Il n’en est pas de même de Jules Héreau (bête fauve) qui avait conçu un projet d’une perversité odieuse : livrer le conservatoire du Louvre, composé des plus honnêtes gens du monde, aux suspicions et aux accusations de la commune ; l’un de ses collègues l’en empêcha en déclarant qu’il ne tolérerait pas une pareille infamie.

L’accusation est nette : c’est dire que je n’avais accepté les périlleuses