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qu’elle ne vous ait pas connu plus tôt. Offrez-moi, je vous prie, des moyens de le réparer, et vous verrez que je suis, monsieur, votre très humble et affectionné serviteur.

LE DUC DE MONTAUSIER.


Assurément, quand on se rappelle qui parle ainsi, on sent que ce n’est pas là une politesse banale. Alceste n’a pas traité de cette façon les quinze ou seize cents personnes qui l’ont complimenté.

Je trouve dans la correspondance de Boursault bien des relations du même genre, et quoique ses lettres soient presque toutes sans date, on voit clairement qu’il s’agit de relations déjà anciennes. C’est le prince de Condé, c’est le maréchal de Créqui, c’est le maréchal de Noailles, c’est la duchesse d’Angoulême, une personne qui n’est pas souvent nommée dans les ouvrages du XVIIe siècle, mais dont la destinée est vraiment singulière. « Qui croirait, dit Boursault, qu’il y ait à Paris une bru dans une parfaite santé, et d’une médiocre vieillesse, dont le beau-père est mort il y a plus de six-vingts ans? Je parle de la duchesse d’Angoulême, qui demeure à Sainte-Elisabeth; elle est bru de Charles IX, qui mourut l’an 1574. Depuis Charles IX, nous avons eu Henri III, Henri IV, Louis XIII et Louis le Grand, qui règne il y a cinquante-quatre ans, et qui en régnerait encore autant si les vœux de ses sujets étaient exaucés. Peut-être depuis les premiers âges où les hommes vivaient si longtemps, n’y a-t-il eu de bru que madame d’Angoulême, qu’on ait vue dans une pleine santé plus de six-vingts ans après la mort de son beau-père. Quelque longue que sa vie puisse être, elle en a toujours fait un si bon usage qu’elle mourra avec plus de vertus que d’années. » Cette lettre est de 1697, puisque Louis XIV est alors, Boursault nous l’apprend, dans la cinquante-quatrième année de son règne; mais il y a environ trente-sept ans que Boursault est attaché à la duchesse d’Angoulême. Quelle est donc cette noble personne au service de qui Boursault est entré tout jeune comme secrétaire, secrétaire de ses commandemens, et dont il a parlé toujours avec un si profond respect? C’est une altesse royale du côté gauche. Les rares érudits qui prononcent son nom après sa mort, dans la première moitié du XVIIIe siècle, Niceron, les frères Parfaict, disent simplement qu’elle était la veuve d’un fils naturel du roi Charles IX. Ce personnage, fils de Charles IX et de Marie Touchet, était né en 1573, un an avant la mort de son père. A dix-huit ans, c’est-à-dire en 1591, il avait épousé Charlotte de Montmorency, fille du connétable, puis longtemps après, devenu veuf, il s’était marié en secondes noces à Françoise de Narbonne. Cette deuxième femme est la duchesse d’Angoulême, qui patronna les débuts de