Page:Revue des Deux Mondes - 1878 - tome 30.djvu/186

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou moins rapide, suivant la force et la durée du vent. Parfois elle se ralentit, mais il suffit d’un ouragan pour lui faire rattraper le temps perdu, et l’on a vu des dunes s’avancer de plus de 60 centimètres dans l’espace de trois heures ; en moyenne on peut compter sur une progression de 20 mètres par an. Tous ces sables sont sortis de la mer, qui journellement en jette de nouveaux sur le rivage; en sorte que les dunes doivent finir par acquérir le volume et les dimensions de nos chaînes de montagnes les plus élevées. La composition du sable varie avec la nature de la roche qui a servi à le former; calcaire sur les côtes de la Normandie, mélangé de coquilles sur celles de Bretagne et de Saintonge, il est au contraire quartzeux entre l’embouchure de la Gironde et de l’Adour; de plus, à une petite profondeur, il renferme toujours une certaine quantité d’humidité. Cette circonstance est due à l’imperméabilité du sous-sol qui empêche les eaux de pluie de s’infiltrer plus profondément et leur permet, par l’action de la capillarité, de remonter à la surface. Ce ne sont pas seulement les côtes françaises de l’Océan qui sont exposées à l’envahissement des dunes; le même phénomène se produit sur celles de la Manche, de la Baltique, de la Méditerranée et même du Pacifique; mais c’est en France que jusqu’ici on s’est, avec le plus de succès, attaché à le combattre, et ce résultat a été obtenu au moyen de plantations de plus maritimes. C’est Brémontier qui, au siècle dernier, eut l’idée d’employer ce procédé, et depuis lors, grâce au décret de 1810 qui autorise l’administration publique, à défaut des propriétaires, à exécuter elle-même les travaux, les plantations se sont étendues sur tout le littoral.

Bien que la masse des dunes se déplace en entier et soit susceptible d’engloutir, par des amoncellemens successifs, les obstacles les plus élevés, le transport s’opère grain à grain à mesure que chacun d’eux, débarrassé de ceux qui le recouvraient, arrive à la surface pour être emporté à son tour. Il suffit donc d’arrêter les grains de la superficie pour maintenir ceux du dessous et pour immobiliser toute la masse. On y arrive en couvrant le sol de branchages et de broussailles inclinés dans le sens du vent, et sous lesquels on sème de la graine de pin maritime. Une fois les jeunes plants enracinés, le sable est arrêté; mais pour que la plantation ne soit pas ensevelie par les sables mobiles voisins, il importe de la commencer près du rivage, dans la partie comprise entre la laisse des eaux et les dunes les plus rapprochées de la mer. On continue ces travaux de proche en proche par bandes parallèles, juxtaposées sans interruption, de façon à ce qu’ils n’aient rien à craindre des dunes mobiles antérieures que le vent continue à pousser vers l’intérieur des terres. On protège ces plantations contre l’envahissement des sables que