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184,000 hectares; mais il ne se rencontre à l’état spontané que sur les sommets des Alpes et manque dans tous les autres massifs montagneux; il croît très lentement et donne un bois à grain fin et serré, lourd, résineux, souple, ne se gerçant pas, et d’une grande durée. Il est de qualité supérieure pour les charpentes et les sciages, et pourrait, ainsi que le chêne, être employé dans la marine comme bordages et même comme membrures ; on en fait aussi des traverses de chemins de fer, des merrains, des échalas, des poteaux télégraphiques, etc.

Le pin sylvestre n’occupe pas moins de 413,000 hectares; c’est un arbre des plaines du nord de l’Europe, qui n’existe en France à l’état spontané que dans les régions montagneuses de moyenne élévation. Partout ailleurs il a été introduit artificiellement; robuste et peu exigeant, poussant également bien dans les sables arides et dans les terres tourbeuses, sur le calcaire et sur le silice, il est l’essence transitoire par excellence pour repeupler les terrains incultes et amender le sol avant d’y introduire d’autres essences plus précieuses. Les montagnes de l’Auvergne, les plaines crayeuses de la Champagne, les terres marécageuses de la Sologne sont, grâce au pin sylvestre, en train de se transformer. La qualité de son bois varie suivant les lieux qui l’ont produit. Dans le nord, où la végétation est lente, les couches annuelles minces et régulières, le bois est homogène, facile à travailler et propre à la menuiserie fine; plus au sud, le tissu se lignifie davantage, devient plus résistant, plus propre aux constructions et particulièrement à la mâture. Le pin maritime, qui s’étend aujourd’hui sur plus de 700,000 hectares, a, comme le pin sylvestre, été introduit en grande partie artificiellement et sert comme lui au repeuplement des parties incultes, surtout dans les régions méridionales et dans les landes de Gascogne. Il fournit un bois de qualité médiocre, mais, soumis à l’opération du gemmage, il donne une résine abondante qui fait l’objet d’une industrie considérable. Les autres espèces résineuses, sauf le pin cembro et le pin à crochet, sont trop peu répandues pour mériter une mention spéciale.

En présence des essences que nous possédons en France, qui ont toutes leurs aptitudes spéciales, pouvant végéter sur tous les sols, il ne semble pas qu’il soit réellement utile d’introduire chez nous des espèces exotiques, qui peut-être ne nous rendraient pas les mêmes services que les nôtres. Pour qu’il y ait intérêt à propager une plante nouvelle dans un pays, il faut d’abord que cette plante ne prenne pas la place d’une plante indigène plus utile, ensuite qu’il soit plus profitable de la produire soi-même que de la faire venir des lieux où elle croît spontanément. Or parmi les essences forestières, nous ne connaissons jusqu’ici que l’eucalyptus qui réponde