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Europe qu’il est compris aux Indes. « D’Europe, dit M. Birdwood, l’Inde paraît fort éloignée; mais l’Europe paraît beaucoup plus près quand on est aux Indes, puisqu’elle est par le fait la première presqu’île au-delà de l’Arabie. »



Le grand péril de l’église de France au dix-neuvième siècle, par M. l’abbé Bougaud, vicaire général d’Orléans. Paris, 1878, Poussielgue.


Nous qui vivons dans le monde, nous avions cru jusqu’alors que les vocations ecclésiastiques ne demandaient pas pour se faire connaître d’être assurées d’une carrière facile à parcourir et agrémentée de plantureuses prébendes. M. L’abbé Bougaud vient d’écrire tout un livre pour prouver que la pauvreté dans laquelle l’état laisse les prêtres est un des plus grands obstacles au bon renouvellement du clergé en France. Maintenant, dit-il, les diocèses qui ont quatorze cures vacantes ne sont pas rares, et les plus favorisés ne peuvent envoyer dans les diocèses voisins des prêtres en assez grand nombre pour remplir les vacances. Cela tient à ce que dans les familles autrefois sacerdotales on étouffe les vocations pour diriger les enfans vers des carrières plus lucratives et moins exposées dans certaines convulsions aux haines des partis extrêmes. — Nous ne saurions être d’accord avec M. L’abbé Bougaud; non, nos prêtres ne recherchent pas une vie facile, et ils nous ont donné souvent de trop bons exemples pour nous permettre de croire que, si les jeunes gens désertent les fonctions sacerdotales, c’est dans l’intérêt de leur fortune et de la sécurité de leur vie. On ne trouve plus autant de vocations véritables parce que les classes dirigeantes se sont peu à peu éloignées de l’église, et cela parce que l’église gallicane a cessé d’exister, parce que nos prêtres n’osent plus se dire libéraux dans une certaine mesure. Aujourd’hui le peu d’hommes marquans qui se rencontrent dans les ordres font partie de tel ou tel couvent : ils sont jésuites, oratoriens etc., et il est difficile de rencontrer un curé de campagne ayant un esprit large et ouvert aux choses de son temps. L’ultramontanisme a étouffé en France, plus peut-être que l’athéisme, les sentimens religieux, aussi bien que les exagérations politiques étoufferaient la liberté elle-même. Reconstituez notre ancienne église, soyez gallicans comme l’ont été la plupart des grands prélats français, et vous verrez renaître un sentiment qui est loin d’être perdu chez nous. Osez ne plus parler du syllabus, de l’immaculée conception, ne sacrifiez plus aux miracles de la Salette et de Lourdes, et alors vous verrez nos églises envahies pour écouter de nouveau votre parole de paix, rendue à la véritable doctrine gallicane.