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qui, le 1er avril 1748, commencèrent à déblayer la cendre qui depuis seize siècles recouvrait Pompéi n’avaient qu’un dessein : ils voulaient trouver des objets d’art pour enrichir le musée du roi. Dès lors il est aisé de s’expliquer la manière dont les travaux furent conduits. On fouillait au hasard et en divers endroits à la fois, selon l’espérance qu’on avait de quelque bonne fortune. Si l’on ne trouvait rien, après quelques recherches on abandonnait la fouille commencée et l’on se transportait ailleurs. Lorsqu’on était embarrassé des décombres, on les rejetait sans plus de façon sur les maisons déjà découvertes, qu’on rendait ainsi à l’obscurité d’où l’on venait à peine de les tirer. Quant à celles qu’on laissait au jour, on ne prenait aucune précaution pour les conserver. Les fresques qu’on n’avait pas jugées dignes d’être transportées au musée de Portici ou de Naples restaient exposées au vent et au soleil, qui en effaçaient vite les couleurs. Les mosaïques achevaient de se détruire sous les pieds des voyageurs et des ouvriers, les murs se lézardaient et finissaient par s’écrouler. Quelques hommes de sens et de science, comme l’abbé Barthélémy, faisaient bien entendre des plaintes sur la façon déplorable dont les fouilles étaient menées; mais, comme après tout elles rapportaient des chefs-d’œuvre et que grâce à elles le musée de Naples était devenu l’un des plus riches du monde, on laissait dire les mécontens. — En réalité ce système barbare, malgré quelques ménagemens que le temps fit introduire, a duré jusqu’à nos jours.

Tout a changé avec M. Fiorelli; il a dit, il a répété dans ses rapports que le principal intérêt des fouilles de Pompéi était Pompéi même, que la découverte des œuvres d’art ne devait passer qu’après, qu’on cherchait avant tout à ressusciter une ville romaine qui nous rendît la vie d’autrefois, qu’il la fallait entière et dans ses moindres recoins pour que l’enseignement fût complet, qu’on voulait connaître non-seulement les maisons des riches ornées de leurs fresques élégantes, revêtues de leurs marbres précieux, mais aussi les demeures des pauvres avec leurs ustensiles vulgaires et leurs grossières caricatures. Dans ce dessein tout devenait important, et il n’était plus permis de rien négliger. Aussi M. Fiorelli se décida-t-il, avant de pousser plus loin les travaux, à revenir sur ce qu’avaient fait ses prédécesseurs. Repassant partout sur leurs traces, il fit étayer et soutenir les murs qui menaçaient ruine, releva ceux qui étaient tombés, protégea les fresques et les mosaïques; en même temps il s’occupa de déblayer définitivement tout ce qu’on avait recouvert de décombres ou omis de fouiller. C’était une entreprise pénible et en apparence peu profitable, car on était sûr de ne pas trouver grand’chose de nouveau dans des terrains déjà explorés. Mais il