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Le XVIIIe n’y ont guère ajouté, et peut-être y ont-ils retranché plus d’un trait original. La royauté, se faisant moins populaire, devient plus retirée ou plus solennelle. Elle renferme ses fêtes dans les magnifiques palais où les femmes et les courtisans parés se livrent à de pompeux divertissemens ou à de libres plaisirs. Ce qui distingue les XIVe et XVe siècles, c’est que plus encore qu’aux époques suivantes, la foule en fait partie essentielle, intégrante ; c’est pour elle aussi que la royauté se met en frais ; c’est son goût qu’on veut satisfaire.

Combien de ces mariages royaux et princiers, de ces entrées solennelles, accompagnées de réjouissances ! On éprouve l’embarras du choix. Je ne m’y arrête pas. Je cherche le type de ce qu’on pourrait nommer : une fête publique sous l’ancien régime. Je ne dis pas qu’on n’en trouve de telles sous Louis XIV, Louis XV et Louis XVI. Mais le genre est formé sous la royauté des Valois. On peut l’affirmer sans nier la splendeur de quelques-unes de ces fêtes des derniers Bourbons ; Versailles nuit à Paris, la cour fait ombre au peuple. La seule grande innovation, sous Henri IV, est le feu d’artifice, connu auparavant, mais fort perfectionné par les Italiens du XVIe siècle, et qui devient au commencement du XVIIe un élément essentiel des grandes fêtes. Les feux d’artifice les plus célèbres seront celui que donna Sully dans la plaine de Fontainebleau, celui de 1612 à l’arsenal, un autre la même année sur la Seine, pour la fête de la Saint-Louis, celui de 1660, lorsque Louis XIV rentra à Paris, après son mariage, celui de 1739 à l’occasion de la paix, etc. ; car l’idée de célébrer la paix par des réjouissances eut aussi plus d’une fois sa part dans ces solennités populaires. Ce n’était pas, il est vrai, la paix en général saluée comme une idée civilisatrice qu’on solennisait, c’était telle paix déterminée, conquise après des succès et accueillie avec un patriotique enthousiasme. C’est donc encore à cette période finale du moyen âge, période brillante s’il en fut, malgré tous les malheurs qui l’accablent, que l’on doit demander les élémens constitutifs des fêtes publiques d’autrefois.

Le type paraît fixé déjà au temps de Charles VI. Voilà, avec tous ses épisodes, la fête publique parisienne d’autrefois. On peut se reporter à ce Paris de 1389, lors de l’entrée dans cette ville de la jeune Isabeau de Bavière. Cette princesse, qui devait exercer une si funeste influence sur les mœurs et les destinées de notre nation, était mariée déjà depuis quatre ans avec Charles VI. On sait que le mariage avait été l’objet de quelques difficultés, malheureusement surmontées. Vive était l’impatience amoureuse du jeune prince, qui montrait déjà plus d’ardeur que de cervelle. Non moins