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involontairement la réplique : « Ceux-là sont morts, » dit-il. Les enfans de Sparte aussi étaient morts, mais ils n’étaient que 300 et près d’un million d’hommes les avait assaillis.

Les vainqueurs trouvent toujours des alliés : la marche de Xerxès à travers la Doride, la Phocide et la Béotie fut une marche triomphale. Avides de pillage, irrités par de vieux griefs, les Thessaliens conduisaient l’invasion. Xerxès ne rencontrait plus que des gens du parti mède ; la cause d’Athènes était aussi abandonnée que le fut en 93 celle de la convention. Reculant partout sur terre et sur mer, les Grecs semblaient concentrer désormais leur espoir dans la défense du Péloponèse. L’armée navale s’était retirée dans la baie de Salamine, les habitans de l’Eubée avaient fui, les Athéniens fuyaient à leur tour. Pour beaucoup, Salamine ne paraissait pas un asile encore assez sûr ; les uns allaient chercher un refuge à Trézène, d’autres demandaient l’hospitalité à Égine. Par bonheur, la flotte n’avait fait de pertes que dans les combats ; la tempête, si cruelle aux Perses, l’avait épargnée. De toutes parts lui venaient en cette extrémité terrible des renforts. L’équilibre du nombre tendait insensiblement à se rétablir entre les deux adversaires qui s’étaient mesurés pendant trois jours sur la rade d’Artémisium. Au moment où les généraux se demandaient s’ils n’abandonneraient pas Athènes à son sort, on comptait devant Salamine 89 vaisseaux du Péloponèse, 180 d’Athènes, 97 de Mégare, d’Ambracie, de Leucade, d’Égine, de Chalcis, d’Érétrie, de Céos, de Naxos, de Styros, de Cythnos, de Crotone. — Serpho, Siphante et Milo n’avaient envoyé que des pentécontores. — 366 vaisseaux sérieusement résolus à combattre, s’appuyant à leur territoire, peuvent en braver 600 ébranlés par toutes les épreuves qui n’avaient cessé d’affliger les Perses. Le point important était de bien choisir le terrain sur lequel on résisterait. La côte était alors la base obligée de tout ordre de bataille. On se battait autant que possible à portée de trait du rivage. Si la trière était fracassée, les naufragés gagnaient le rocher le plus voisin, la grève la plus proche, à la nage. Vaincus en vue de Salamine, les Grecs n’avaient pour refuge qu’une île où il serait facile au vainqueur de les bloquer ; défaits près de l’isthme qui sépare le golfe de Corinthe de la mer d’Égine, ils avaient tout le Péloponèse derrière eux. C’était donc vers l’isthme qu’inclinaient généralement les projets de retraite ; les Athéniens seuls ne pouvaient se décider à s’éloigner de l’Attique. Mais l’Attique n’était-elle pas irrévocablement perdue ? Ravagée tout entière par le fer et la flamme, elle ne présentait plus qu’un monceau de ruines. Athènes même, laissée sans défenseurs, venait d’être occupée. A quoi bon s’obstiner à rester sous ses murs ? Déjà les généraux du Péloponèse avaient peine à