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des lumières, non des excitations, pour s’éclairer de l’éternelle, expérience humaine, et pour des hommes qui ont leur patrie à relever, des désastres à réparer, des réformes de tous les jours à réaliser, la puissance nationale à raffermir et à remettre en marche, il resterait certes assez à faire ; il y aurait assez de questions pressantes, pratiques, où tous les patriotismes pourraient se rencontrer sans se heurter, où la contradiction même, au lieu d’être considérée comme une marque d’irréconciliables hostilités, devrait n’être qu’un moyen de plus pour s’exciter à l’œuvre commune. C’est la tâche des assemblées, et, puisqu’il y a dans ces assemblées une majorité républicaine, c’est la tâche de cette majorité, d’autant plus obligée à un travail sérieux, à la modération et à la prévoyance, qu’elle est la majorité, qu’elle peut tout faire, tout seconder ou tout empêcher.

Est-ce donc, encore une fois, que leg questions manquent ? Il y en a de tous les jours, et il y en a qui attendent une solution depuis des années. Elles se reproduisent incessamment, tantôt sous la forme des affaires de finances ou de chemins de fer, tantôt sous la forme de ces projets qui se succèdent, qui touchent à notre réorganisation militaire. L’autre jour encore, dans le sénat, à propos de la création des ressources nécessaires pour ce rachat d’un certain nombre de chemins de fer qui a été récemment voté, M. le ministre des finances a tracé un exposé aussi lumineux que rassurant de notre situation économique. M. le ministre des finances, dans un langage aimable et presque familier, a témoigné une juste confiance ; mais en même temps il s’est défendu des illusions optimistes, il a eu bien soin de montrer à l’horizon ce qui pouvait être un péril, les engagemens téméraires, les dégrèvemens trop hâtifs, les aggravations de charges improvisées par l’initiative parlementaire et venant troubler toute l’économie d’un budget, M. le ministre des finances est à la fois confiant et prévoyant. M. Léon Say n’a point hésité à déclarer, qu’il n’y avait aucune inquiétude à avoir, à une condition pourtant, à la condition qu’on saurait se défendre des entraînemens irréfléchis, — « et, a-t-il ajouté, je compte sur vous pour m’aider à y résister énergiquement. » C’est le secret de l’équilibre financier, c’est là aussi que le sénat peut avoir une action utile, profitable au pays autant qu’à son propre crédit d’assemblée expérimentée et modératrice.

Il y a surtout des questions qui se renouvellent sans cesse, qui sont pour le moins aussi sérieuses et plus délicates encore que les questions financières, ce sont celles qui intéressent la reconstitution des forces militaires de la France. Assurément bien, des efforts patriotiques ont été faits depuis sept ans., On ne s’est refusé à aucun sacrifice pour rendre au pays l’armement, qu’il avait perdu et pour lui assurer une organisation efficace. L’ancienne assemblée, les chambres nouvelles n’ont laissé passer