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d’une route nationale serait une gêne pour un, deux ou trois départemens ; le reste de la France ne s’en apercevrait pas. Le raisonnement peut être valable en temps ordinaire ; il cesserait de l’être si quelque événement, qu’il faut toujours prévoir, entravait la marche régulière des trains. On l’a bien vu en 1870, et l’on doit penser que le ministre de la guerre ferait valoir à l’occasion qu’il n’est pas indifférent à la défense nationale de maintenir de bonnes chaussées, aux frais du trésor public, sur la surface entière du pays. Au contraire, les simples chemins vicinaux doivent rester à la charge des communes qui seules en profitent. Entre ces deux catégories extrêmes, le langage administratif connaît trois autres catégories désignées sous les rubriques de routes départementales, chemins de grande communication, chemins d’intérêt commun. Du plus au moins, ces voies de communication ont le caractère commun de servir à un trafic de transit en même temps qu’à un trafic local. Au point de vue de la dépense, elles sont soumises à des régimes différens : les premières sont à la charge exclusive des départemens, les secondes à la charge des communes avec subvention des départemens, les dernières à la charge exclusive du groupe de communes qu’elles desservent. Il en résulte cette conséquence peu équitable, que les communes traversées par les routes départementales en ont le profit sans en payer l’entretien, et que, les ressources du département et des communes étant inégalement réparties, ce n’est pas dans la mesure exacte des besoins que les chemins sont entretenus. Les conseils-généraux ont en leur pouvoir le moyen d’y remédier ; les uns ont transformé tous les chemins de grande communication en routes départementales ; d’autres ont fait l’opération inverse. Il ne peut y avoir en ces matières une règle uniforme pour toute la France. Le législateur a remis avec raison aux assemblées locales le soin d’en décider.

La réforme de la prestation en nature est une affaire plus complexe. Avec moins de gravité, parce que l’impôt est aujourd’hui moins lourd, avec moins d’aigreur, parce qu’il n’y a plus d’exemptions par privilège, la discussion est aujourd’hui entre les partisans et les adversaires de la prestation ce qu’elle était il y a cent ans entre Turgot et les parlemens. Cela justifie peut-être les développemens historiques qui ont été donnés au commencement de cette étude. De nos jours, comme sous Louis XV, on dit qu’il est imprudent d’ébranler ce qui existe ; on fait valoir un meilleur argument, que la conversion en argent du travail en nature serait une aggravation formidable de l’impôt foncier. Au surplus n’est-ce pas un des principes financiers les mieux établis qu’un impôt modéré n’est jamais inique parce que les lois secrètes de l’incidence compensent ce qu’il y a d’injuste dans la répartition apparente ? Sans