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commencement d’une réorganisation plus sûre, plus équitable et plus efficace pour l’Orient.

C’est dans ces conditions que nos chambres sont rentrées hier à Versailles pour reprendre leur session interrompue il y a un mois, et elles ont à coup sûr bien des raisons de s’observer, d’éviter les diversions passionnées et stérilement agitatrices ; elles ont particulièrement aujourd’hui deux, raisons, — l’exposition qui va s’ouvrir et ces affaires d’Orient qui restent comme un nuage noir sur l’Europe, qui, sans engager directement la France, ne peuvent la laisser inattentive.

On répète assez souvent depuis quelque temps qu’il y a de toutes parts un sensible apaisement d’opinion, que la confiance dans les institutions nouvelles fait de rapides progrès, que la république a définitivement conquis le pays, et en effet il n’est point douteux que tout est pour le moment au calme, à la tranquillité. Les chambres se sont rarement réunies dans une plus profonde paix intérieure. Les conflits se sont évanouis, les pouvoirs ne sont plus en guerre. Si la confiance n’est pas aussi complète qu’on le dit, il y a du moins un besoin instinctif de se rassurer, et sait-on à quoi tient ce rassérènement d’une situation naguère si troublée ? C’est que ce qui existe aujourd’hui est après tout le résultat du cours naturel des choses, du jeu des institutions ; c’est que le dénoûment des dernières crises a été conquis sans effraction, sans violence, par une manifestation légale d’opinion ; c’est que le pouvoir est passé, sinon sans peine, du moins sans révolution, dans les mains d’un ministère qui reste le représentant honorable et sensé de ce qu’il y a de plus légitime ou de plus pratique dans les vœux de la majorité républicaine élue par le pays. Tout s’est passé régulièrement, et c’est là, si on le veut bien, ce qui peut donner un caractère sérieux et durable à cette paix intérieure reconquise. Oui, assurément, les épreuves les plus dures sont passées. Le régime nouveau n’est plus contesté, et il a aujourd’hui l’avantage d’avoir montré, dans des circonstances difficiles, qu’il pouvait suffire à tout. La république n’est plus menacée par ses adversaires, qui se découragent ou se débandent, qui, dans tous les cas, sentent pour le moment leur impuissance. C’est là le beau côté. Il n’y a qu’un point noir qui peut grossir si l’on n’y prend garde. Le danger pour la république n’est pas maintenant dans ses adversaires, il est dans l’abus de cette récente victoire, dans les mesquines représailles d’une majorité toute-puissante, dans les âpretés jalouses et exclusives de l’esprit de parti, dans les impatiences de domination, dans la manie de tout remuer et de tout agiter. Tant qu’il n’y a que des discussions vaines et des propositions saugrenues, ce n’est rien encore, quoique ce ne soit pas sans inconvénient. La question change de face dès qu’on touche aux fondemens de l’état, aux ressorts essentiels de la puissance nationale, à l’économie publique, aux finances.

Voilà le danger ! Ce n’est point sans doute que la situation écono-