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Lyon, avec laquelle il ne cessa jusqu’à la fin d’entretenir de bons rapporte de voisinage. Il lui écrivait de temps à autre, toujours de la façon la plus aimable, soit pour lui faire hommage de ses principaux ouvrages, soit pour lui recommander quelques candidats à ses places d’honoraires et d’associés. Indépendamment de ces relations en quelque sorte officielles, il entretenait avec plusieurs de ses membres, avec Bordes, Vasselier, avec les de Fleurieu, la correspondance la plus intime et la plus amicale.

L’académie, de son côté, ne fut pas infidèle au souvenir de Voltaire. En 1776, le sculpteur Poncet, un de ses associés, lui fit hommage du buste de Voltaire, qu’il venait de modeler à Ferney. « L’image du plus illustre des académiciens lyonnais, dit M. Dumas, l’historien de l’académie, fut placée pendant le séance sur le bureau. Elle rappelait le jour mémorable où Voltaire lui-même vint s’asseoir parmi ses confrères. » Enfin c’est devant l’académie de Lyon que La Harpe, un autre de ses associés, lut en 1779, pour la première fois, son éloge de Voltaire.

Si nous n’avons plus à mettre en scène des hommes aussi illustres, nous rencontrons encore plus d’un nom célèbre parmi les associés qui, comme Voltaire, vinrent siéger au milieu de leurs confrères de Lyon et se faire recevoir en séance publique.

La réception de l’avocat-général Servan fut aussi pour l’académie et pour le public un jour de fête et d’enthousiasme. Servan, avocat-général du parlement de Grenoble, est un des magistrats du XVIIIe siècle qui se signalèrent par leurs efforts pour faire pénétrer dans les lois les progrès de la raison et de la philosophie. Il prononça à l’hôtel de ville, devant une foule empressée de l’entendre, un discours qu’on trouve dans ses œuvres avec le titre ambitieux d’Essai sur les progrès des connaissances humaines en général, de la morale et de la législation en particulier. Là, sous la forme déclamatoire, qui était si à la mode en 1781, se rencontrent tous les sentimens généreux, toutes les idées de progrès et de liberté de la fin du XVIIIe siècle et toutes les illusions de paix et de félicité universelles, à la veille des plus grandes catastrophes. La politique, qui bientôt allait tout envahir, déjà prenait place dans un discours académique. L’orateur parla en termes si pathétiques de la retraite récente de Necker qu’il arracha, dit-on, des larmes à l’auditoire.

Près de Lyon, dans la petite église du village d’Oullins, est le tombeau de l’auteur des éloges de Marc-Aurèle et de Descartes. Thomas, âgé et souffrant, s’était arrêté à Lyon, à son retour de Nice, en 1785, et avait loué dans ce village la même maison qui depuis fut habitée par Jacquard. Voici qu’une horrible nouvelle vient bientôt l’arracher à cette douce retraite. Il apprend que Ducis, son ami, celui-là même qui seul, disait-il, manquait à son bonheur, a fait une chute affreuse,