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même qui les recouvre, il y avait un autre cimetière, un cimetière à ciel ouvert comme les nôtres, qui couvrait une vaste étendue et dont il reste d’importans débris. On ne pouvait guère espérer, à la vérité, que celui-là fût aussi riche que les autres en souvenirs antiques. Il ne s’enfonçait pas comme eux dans la terre, il n’était pas protégé par sa situation contre les convoitises et les rapines. Il se trouvait sous les pas des pillards de toutes les nations qui depuis le Ve siècle se sont précipités sur Rome. Cependant M. de Rossi n’a pas laissé d’y faire quelques découvertes intéressantes.

Il fallait avant tout fixer l’époque pendant laquelle les cimetières de ce genre ont été en usage. M. de Rossi y est arrivé facilement, grâce aux inscriptions qu’il y a trouvées. Les plus anciennes sont du temps de Constantin et de ses fils ; les dernières portent la date de 565 ; à ce moment, l’Italie est dévastée par les Goths. Totila campe aux portes de Rome, on ne peut plus sortir sans péril des murailles, et l’on se décide à établir des cimetières nouveaux dans l’enceinte même de la ville. La guerre et les maladies l’ont tellement dépeuplée en quelques années qu’elle suffit amplement à loger les vivans et les morts. On voit donc les raisons qu’on avait au VIe siècle de renoncer aux cimetières placés dans la campagne romaine. Il n’est pas plus difficile de comprendre pourquoi on ne s’en était guère servi avant Constantin. Le terrain appartenait à l’église, car elle ne pouvait s’assurer la possession de ses hypogées qu’en acquérant la propriété du sol supérieur ; elle aurait donc pu l’employer aux sépultures des fidèles, comme on faisait en d’autres pays, mais elle craignait les emportemens populaires, elle savait qu’en Afrique la foule avait plus d’une fois violé les tombes chrétiennes et jeté les cadavres sur la voie publique ; c’étaient, à la vérité, des excès d’un moment. Dans les temps calmes, les sépultures étaient protégées par le respect qu’on portait généralement aux morts et les prescriptions formelles de la loi ; mais ces prescriptions mêmes pouvaient causer quelque inquiétude à des consciences chrétiennes. La loi civile mettait les sépultures sous la garde des pontifes ; ils avaient sur elles une sorte de droit de surveillance. Pour changer une tombe de place, il fallait en obtenir d’eux la permission, et ils exigeaient d’ordinaire qu’on demandât pardon au mort de le déranger en lui offrant un sacrifice. C’est ce qu’un chrétien n’aurait jamais voulu faire : aussi préférait-on les sépultures souterraines où l’on était libre d’enterrer ses morts comme on voulait et qui échappaient plus aisément aux fureurs de la populace et à la protection de l’autorité. Mais après Constantin on ne courait plus les mêmes dangers, et l’église pour ses sépultures put employer sans crainte le sol supérieur des catacombes.

Ce sol devait être presque partout inoccupé ; M. de Rossi suppose pourtant qu’en certains endroits on y avait construit de petites