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on est même parvenu à photographier les trajectoires des boulets. Il faut enfin mentionner ici les dépêches réduites à des dimensions microscopiques et confiées à des pigeons voyageurs, qui ont rendu tant de services pendant le siège de Paris. La marine, les administrations de l’agriculture, des travaux publics, etc., ne profiteront pas moins des facilités nouvelles que procure la photographie pour remplacer par la saisissante réalité d’une image l’à-peu près si abstrait et si vague des descriptions. A l’exposition de 1867 figuraient un album formé par M. Jubert à l’école de Grignon, une collection d’épreuves, représentant les diverses essences d’arbres, que M. de Gayflier avait réunies pour l’administration des eaux et forêts ; les exemples de ces applications sont trop nombreux pour qu’il soit besoin d’insister.


II

La météorologie pratique a également trouvé dans la photographie un auxiliaire qui débarrasse l’observateur de la partie la plus fastidieuse de son travail ; docilement et fidèlement, elle enregistre les oscillations du baromètre et du thermomètre, les variations du magnétisme terrestre et celles de l’état électrique de l’air, etc. Cette substitution d’automates à la place des observateurs est d’une grande importance pour l’avenir de la science. « Les appareils enregistreurs, disions-nous ici même, sont en cela supérieurs à l’homme, que rien ne peut lasser leur zèle, que rien ne les rebute, que la monotonie est leur élément, et la régularité leur condition d’existence. Voilà un observateur qu’il suffit de monter en tournant une clé : il reste désormais à son poste, l’œil clair, la main ferme, jour et nuit, sans dormir, sans se plaindre de la chaleur ou du froid, sans s’abandonner à des rêveries, et, ce qui est encore plus important, sans qu’il songe jamais à fabriquer des observations imaginaires qui le dispenseront de veiller[1]. »

Un autre avantage considérable des appareils enregistreurs, c’est qu’ils nous présentent tous les résultats sous une forme qui parle aux yeux ; ce ne sont plus des tableaux numériques composés de chiffres isolés qu’il a fallu péniblement réunir en les relevant un à un, à des heures fixes ; ce sont des courbes continues dont la signification est immédiatement claire, et qui permettent de saisir toutes les phases des phénomènes dont l’ensemble constitue le climat d’un lieu. Cette représentation figurative des élémens météorologiques, cette sorte de sténographie du temps, nous dispense aussi de tous ces calculs fatigans que nécessite la conversion des

  1. Les Appareils météorographiques, Revue du 1er juillet 1867.