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une époque donnée. La photographie permet encore d’observer en quelque sorte automatiquement les éclipses, les passages de planètes au devant du soleil, les occultations de planètes par la lune, les passages des astres au méridien pour la détermination de l’heure absolue ; elle permet de reproduire le spectre solaire avec toutes ses raies, et d’en étendre les limites bien au-delà des rayons visibles.

Nous avons déjà vu que les premières tentatives de « photographie céleste » avaient été faites en France. Vers 1850, elles furent reprises dans divers pays à la fois. William Cranch Bond, à Cambridge, en Amérique, obtenait de bonnes images de la lune, des étoiles Véga et Castor ; le père De Vico essayait, sans succès il est vrai, de photographier la nébuleuse d’Orion ; le révérend J.-B. Reade faisait de la photographie stellaire à l’observatoire du docteur Lee, à Hartwell, et à son observatoire du vicariat de Stone ; le père Secchi, à Rome, et Berkowski, à Kœnigsberg, tentèrent de photographier l’éclipse du 28 juillet 1851 ; enfin M. Warren de La Rue commença en 1852 ses travaux de photographie céleste dans sa maison de Canonbury, à Londres, en substituant aux procédés de Daguerre ceux de Fox Talbot. À cette époque, le temps de pose était encore considérable, et il fallait suivre à la main le mouvement de la lune pendant toute la durée de l’opération ; mais en 1857 M. Warren de La Rue réussit à simplifier son procédé. Le temps de pose fut réduit, pour la lune, à 9 ou 10 secondes, à 12 secondes pour Jupiter, à 1 minute pour Saturne, à 2 ou 3 minutes pour les étoiles les plus brillantes. M. Warren de La Rue se fit alors construire un observatoire spécialement approprié à ce genre de recherches au village de Cranford, à 20 kilomètres à l’ouest de Hyde-Park[1]. L’instrument principal de cet établissement était un télescope newtonien, de 13 pouces d’ouverture et de 10 pieds de longueur focale, dont le miroir avait été fait par M. Warren de La Rue lui-même, et qui était monté équatorialement, c’est-à-dire de façon qu’il pût tourner autour d’un axe parallèle à l’axe du monde et suivre ainsi la progression diurne des astres sous l’impulsion d’un mouvement d’horlogerie. Obligé depuis quelques années, par l’affaiblissement de sa vue, à renoncer aux travaux de cette nature, M. Warren de La Rue a fait don de son télescope et de tout son attirail de photographie à l’observatoire savilien d’Oxford, qui a été récemment créé pour servir exclusivement aux recherches d’astronomie physique[2].

  1. Voyez l’Astronomie pratique et les observatoires en Europe et en Amérique, par MM. C. André et G. Rayot, 1874.
  2. Oxford possède en outre un célèbre observatoire astronomique connu sous le nom de Radcliffe Observatory, et dont la construction fut commencée en 1771 à l’aide d’un legs du docteur Radcliffe. L’observatoire nouveau porte le nom de sir H. Saville, qui a fondé une chaire d’astronomie à l’université d’Oxford.