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l’observation, » comme Paul Delaroche, sortant d’une séance chez Daguerre, s’écriait : « La peinture est morte à dater de ce jour. » La peinture n’est pas morte, et la photographie ne tuera jamais l’observation ; mais chaque jour confirme l’espoir qu’elle en agrandira le champ d’une manière prodigieuse.

Si on a pu avec quelque raison reprocher à la photographie de rabaisser l’art parce qu’elle ne peut donner, « au lieu d’une image du vrai, qu’une effigie brute de la réalité[1], » cette fidélité de la reproduction est précisément son mérite principal dès qu’il s’agit d’une application scientifique. Le peintre, et même le graveur, doivent traduire et commenter ; mais la science préfère le mot à mot. Il est inutile d’insister sur les services que la photographie a déjà rendus et qu’elle rendra encore aux sciences naturelles par la reproduction fidèle des objets qui sont de leur domaine ; animaux et plantes, tout ce qui frappe le regard peut être instantanément inventorié et catalogué, avec tous ces détails infimes que le dessinateur le plus exercé oublie si facilement. Le microscope lui-même confie ses révélations à la plaque sensible, et la photomicrographie est devenue une branche importante de la science des infiniment petits. Mais cette facilité avec laquelle nous pouvons désormais saisir et fixer les détails d’un objet n’est peut-être pas le plus important des services que la photographie est appelée à rendre aux observateurs ; ce qui est plus précieux, c’est qu’elle permet d’enregistrer les phénomènes qui se succèdent rapidement, qui ne durent qu’un temps très court, une fraction de seconde. De ce nombre sont les phénomènes astronomiques instantanés, les variations incessantes des élémens météorologiques et celles du magnétisme terrestre, le jeu si prompt des organes vivans.


I

La photographie astronomique comprend, en premier lieu, la représentation de la surface des corps célestes assez rapprochés de nous pour que le télescope ait prise sur eux et puisse nous en donner une image grossie : on a réussi à photographier le soleil avec ses taches et ses facules, puis la lune avec tous les détails de sa surface accidentée, enfin les grosses planètes telles que Jupiter, Mars, Saturne. En second lieu, il est possible d’obtenir par ce moyen des images exactes des groupes stellaires, et de déterminer ainsi instantanément la situation relative de certaines étoiles pour

  1. Voyez, dans la Revue du 1er avril 1850, la remarquable étude de M. H. Delaborde sur la Gravure et la photographie.