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LES
INSTITUTIONS MILITAIRES
ET LES ARMEES

On raconte que les gens de San-Francisco, devenue presque soudainement l’une des plus grandes et plus riches cités du Nouveau-Monde, voulant rendre définitives les habitations en briques et à massifs pans de bois, vastes et solides, mais provisoires, élevées sur le sol par les premiers immigrans, n’ont pas reculé devant l’effort de les soulever dans leur masse entière, pour les asseoir sur des fondations à pierre et à chaux. Je crois que, lorsqu’en France la fièvre « de l’organisation de l’armée » se sera calmée, nous ne pourrons pas reculer devant l’effort de soulever l’énorme machine militaire qu’elle a produite, pour l’asseoir sur des fondations plus solides et plus durables que celles qu’elle a. Ces fondations à pierre et à chaux, ce sont les institutions militaires.

Cette réflexion ne contient pas, à l’adresse de nos organisateurs, le reproche détourné d’avoir manqué à l’inflexible règle qui veut qu’en toute chose « on commence par le commencement. » Ils ont fait ce qu’ils ont pu et comme ils ont pu, allant au plus pressé, au milieu des calamités de la guerre civile et des menaces de la guerre étrangère. Le gouvernement lui-même, tout entier aux difficultés et aux périls de la situation, n’avait eu ni la liberté d’esprit ni le temps de réunir et de coordonner les principes fondamentaux des institutions et les règles ou les faits relatifs à l’organisation, dans un travail d’ensemble préparé par les spécialités de l’armée qui l’auraient défendu devant l’assemblée politique délibérante, appelée à le consacrer par la loi. Ce fut au contraire l’assemblée, jetée par les événemens hors de son rôle, qui eut pendant longtemps