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de la Grande-Bretagne. La couronne britannique n’a plus exercé sur ces dépendances d’outre-mer qu’une sorte de patronage bénévole ; elle a été non plus un maître qui dicte des lois, mais un arbitre que l’on invoque dans les cas embarrassans. Elle avait donné ses soldats, son argent, ses enfans les plus hardis, pour fonder des républiques qui, devenues grandes et régies par un gouvernement parlementaire, ne lui accordent plus qu’une déférence respectueuse. On le conçoit, ce n’est pas sans luttes ni débats que s’est accomplie cette émancipation ; ce n’est pas sans tiraillemens que se sont organisés une constitution, un parlement, un ministère responsable, dans une contrée où tout était neuf, à des milliers de lieues du foyer européen. Aussi l’histoire politique de ces jeunes états n’est-elle pas dépourvue d’intérêt, celle du cap de Bonne-Espérance surtout. Au Canada, il y avait des traditions déjà vieilles de deux cents ans et plus ; en Australie, la terre étant à peu près déserte, la tâche était moins épineuse parce que nulle complication de politique étrangère n’embarrassait les immigrans. Dans l’Afrique australe au contraire, les colons étaient d’origine diverse, les uns Hollandais, d’autres Anglais, les uns et les autres fidèles aux mœurs, à la langue, à la religion de leurs patries respectives ; il y avait en plus des tribus natives de force à se défendre contre les intrus. Après soixante et quelques années de discordes intestines, ces éléments variés se sont si bien confondus que tous semblent être sur le point de s’amalgamer en une confédération unique.

Ce que l’on doit entendre sous le nom d’Afrique australe est l’immense territoire en forme de triangle qui, borné par l’Atlantique d’un côté et par l’Océan-Indien de l’autre, pénètre dans l’intérieur jusqu’au tropique du Capricorne, et qui mesure environ 2,000 kilomètres de l’est à l’ouest et 1,200 du sud au nord. Toute cette superficie n’est pas d’égale qualité. A l’extrême pointe, où se fondèrent les premiers établissemens, le sol se prête aux cultures européennes et à l’élevage des bestiaux ; c’est là que la colonisation s’est le plus développée. Au nord du fleuve Orange, il y a sur le littoral de l’Atlantique la terre des Namaquas, encore peu connue ; au centre, le désert stérile de Kalahari, sans eau ni verdure ; puis le Griqualand, où les mines de diamant ont été découvertes il y a peu d’années, et la province d’Orange, où se réfugièrent en 1834 les Hollandais mécontens de la domination britannique. De l’autre côté du Drakenberg, sur le versant de l’Océan-Indien, un vaste district réservé aux Cafres sépare Natal des vieilles provinces du Cap ; au-dessus de Natal est un territoire réservé à d’autres indigènes, les Zoulous, et sur la gauche, le Transvaal, plateau salubre et fertile dont l’annexion est un fait tout récent. Tout cet ensemble