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et nous ne voyons pas en quoi ces tristes reliques d’un passé qui n’a rien de glorieux peuvent servir « à l’honneur et à l’exemple d’un peuple ! » Aussi chez le visiteur l’écœurement succède-t-il bientôt à la curiosité ; il presse le pas, renonçant à faire un triage dont les organisateurs du musée auraient dû se charger, et il se demande comment des industriels ou des travailleurs, sans guide au milieu d’un tel entassement, peuvent y faire les distinctions nécessaires. Nous avons vu nous-même dans les salles du musée des dessinateurs qui copiaient avec le plus grand soin des objets du goût le plus détestable, destinés apparemment par eux à servir de modèle à l’industrie contemporaine.

L’exposition industrielle de Munich permettait d’apprécier les conséquences de pareils enseignemens ; mais, sans sortir du Palais de Cristal, on pouvait voir aussi les efforts faits pour élever le niveau du goût dans la production. Déjà, à la suite de l’exposition de 1867, nos voisins, justement préoccupés de leur infériorité sous ce rapport, avaient jeté le cri d’alarme. Dans les capitales et jusque dans les moindres centres, ils s’étaient appliqués à la création ou au développement de musées industriels et à la réforme de l’enseignement du dessin. Cet enseignement, d’après les décisions d’un congrès récent, doit être désormais organisé dans toutes les villes qui comptent plus de 10,000 âmes, et les relevés statistiques montrent que, pour certains pays, le Wurtemberg, par exemple, les résultats obtenus à cet égard sont déjà considérables. Des centres modestes tels que Cannstatt, Essling, Heilbronn, qui n’ont pas plus de 15,000 à 20,000 habitans, comptent déjà chacun plus de 150 élèves suivant les cours de dessin ; Stuttgart, avec 107,000 habitans, a 663 élèves ; 15 professeurs sont attachés à l’école d’art industriel de Munich, et à Berlin, à Vienne, à Dresde, le programme des écoles de dessin fréquentées par les garçons ou par les filles est des plus complets. Comme nous avons pu le constater d’après la nombreuse et intéressante exposition des travaux de ces écoles, installée également au Palais de Cristal, on a particulièrement insisté sur l’enseignement spécial que peuvent réclamer dans les diverses localités les fabrications propres à chacune d’elles. On a mis également la plus louable émulation à procurer aux jeunes filles l’accès de certaines professions avantageuses pour elles, parce que, sans exiger aucun déploiement de force, elles mettent en œuvre des qualités qui leur sont naturelles et peuvent, le plus souvent, être exercées au foyer même de la famille. Une large part leur était donc faite dans cette exposition, où l’on pouvait voir, non-seulement leurs dessins, mais les applications qu’elles font de leurs travaux scolaires à la confection de broderies, de tapisserie, d’ouvrages au