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croisière ennemie ; ajoutons qu’en 1870 il a fondu sa part de canons et d’obus pour seconder un dernier élan de résistance ; qu’enfin la possession d’une usine par l’état limite les prétentions que l’industrie privée pourrait avoir vis-à-vis de lui, et règle en quelque sorte le maximum des prix qu’elle pourrait lui imposer pour telle ou telle fourniture. A Brest, notre marine militaire a aussi des ateliers de construction très importons, et ceux-ci, il n’est pas besoin de le dire, sont en complète rivalité avec ceux d’Indret.

Couëron vient après Basse-Indre, sur la même rive de la Loire. On y remarque une grande usine à plomb argentifère, appartenant à des Anglais, les mêmes qui possèdent aussi les mines et les usines de Pontgjbaud, dans le Puy-de-Dôme. A Couëron, on reçoit par bateau à vapeur les minerais d’Espagne et de Sardaigne, la houille d’Angleterre. Les minerais sont principalement des galènes ou sulfures très riches en plomb, pauvres en argent. On les calcine et on les fond dans des fours à réverbère ou à cuve, et l’on obtient ainsi le plomb d’œuvre ou argentifère. On enrichit celui-ci en argent par la fusion et le brassage dans des chaudières hémisphériques ouvertes, dites à la Pattinson, du nom de l’inventeur anglais qui découvrit ce procédé il y a cinquante ans. Enfin on sépare le plomb de l’argent par la méthode anglaise, dans un four à coupelle mobile. En 1876, on a produit ainsi à Couëron 3,800 tonnes de plomb doux en saumon, et 1,538 kilogrammes d’argent en lingot, le tout provenant de 4,650 tonnes de minerai. La production mensuelle, actuellement, peut se calculer à 400 tonnes de plomb, ce qui donnera 4, 800 tonnes pour la production totale de 1877. L’usine occupe une centaine d’ouvriers ; elle sera bientôt complétée par un atelier de fabrication du blanc de plomb ou céruse, dont on connaît l’emploi dans la peinture, et par un atelier de laminage et d’étirage du plomb pour en faire des feuilles et des tuyaux. Les mines de plomb et de zinc argentifères de Ponpéan (Ille-et-Vilaine) ont donné naissance à l’usine de Couëron. Aujourd’hui ces mines sont arrêtées, comme aussi celles d’Huelgoët et de Poullaouen, dans le Finistère ; l’usine de Couëron est passée aux mains d’une compagnie anglaise, et c’est à l’Espagne et à la Sardaigne que celle-ci va demander ses approvisionnemens. Il y a plus d’une leçon à tirer de ces faits.

Presqu’en face de Couëron, dont il faudrait visiter aussi l’importante verrerie, est Le Pèlerin, qui fut jadis un des ports d’attache de Nantes, un des points où les navires s’allégeaient pour remonter plus facilement la Loire. Sur la même rive, beaucoup plus en aval, vient Paimbœuf, en breton Pen-Bo, la tête de bœuf, dont le port s’ensable et n’a plus d’ailleurs la même importance qu’autrefois. On y voit une grande fabrique de cordages pour la marine, qui