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étudiée, et qu’il a essayé de nous rendre à peu près comme elle devait être à la mort d’Hadrien.

Il est difficile de jeter les yeux sur la restauration qu’il en a faite sans être un peu ébloui de tant de magnificence. On imagine difficilement une réunion d’édifices plus riches et plus variés. C’est une suite incroyable de portiques, de péristyles, de bâtimens de toute forme et de toute dimension. Les dômes des grandes salles, les voûtes rondes des exèdres s’y mêlent aux frontons triangulaires des temples, tandis que les tours élevées et les terrasses ombragées de treilles se dressent au-dessus des toits. A notre admiration se joint pourtant quelque surprise : l’ensemble de ces vastes constructions nous échappe ; nous en admirons la variété, nous y trouvons une fécondité remarquable d’inventions et de ressources, mais nous sommes étonnés de n’y pas voir plus de symétrie. C’est l’impression que produit aussi le Forum, si rempli de temples, de trophées, de basiliques, et le Palatin avec les cinq ou six palais qui l’encombrent. Nous en avons conclu, on s’en souvient, que les Romains étaient moins sensibles que nous à certaines beautés qui nous charment, et que probablement nos grandes rues droites et nos places régulières les auraient laissés froids. La villa d’Hadrien confirme cette opinion. L’architecte semble y avoir ajouté les édifices les uns aux autres à mesure que le besoin s’en faisait sentir sans se préoccuper de l’effet que l’ensemble pouvait produire. Il faut prendre notre parti de ce peu de goût des Romains pour la symétrie. Songeons qu’après tout il ne s’agit pas ici d’un palais situé dans une capitale, qui doit avoir un grand air et donner une idée avantageuse de celui qui l’habite, mais d’une maison de campagne où l’architecte est tenu de se soucier de la commodité bien plus que de l’apparence.

J’éprouve quelque peine à conduire le lecteur, qui n’a pas, comme moi, le plan de M. Daumet sous les yeux, à travers cette succession de salles et de portiques. Comme la destination de la plupart de ces pièces est inconnue, on trouverait peu d’intérêt à les étudier l’une après l’autre : il faut se borner aux plus importantes. Les appartemens de réception, ceux au moins que leur magnificence semblait réserver à cet usage, étaient situés du côté de l’est. On n’y arrivait qu’après avoir traversé une longue suite d’édifices divers qui devaient faire une grande impression sur le visiteur. Un vestibule octogone, de forme élégante, conduisait dans une de ces cours que les Romains nommaient des péristyles. Il y en avait beaucoup dans la villa, mais celui-là devait être plus vaste et plus beau que les autres. On y a trouvé tant de riches débris que les architectes qui le déblayèrent lui donnèrent le nom de Piazza d’oro. Il était entouré d’un portique avec des colonnes de cipollin et de granit oriental ; un pavé de marbres roses en couvrait le sol, et des