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auquel la reine a commandé par une lettre de sa main d’aller faire sa charge de chancelier. L’un et l’autre accusent le coadjuteur de leur avoir fait jouer cette pièce ; il en est pourtant fort innocent.

« Si la promotion n’était pas faite avant la seconde semaine de carême, faites toujours mine de vous en revenir, et pourtant n’en faites rien que vous ne voyez encore un ordre plus précis de moi. Entre-ci et ce temps-là je prendrai mes dernières résolutions. »

Dans la lettre qui suit, le coadjuteur témoignait à l’abbé son découragement sur l’issue de son affaire, qu’il tenait encore plus compromise à Rome qu’à la cour de France. Il l’engageait pourtant à rester à Rome, tout en feignant chaque jour d’être sur son départ. Enfin, il déclarait à l’abbé qu’il avait nettement refusé au duc d’Orléans de se réconcilier avec M. le prince et qu’en même temps il se prononçait hautement contre lui et contre Mazarin.

« J’ai reçu cette semaine deux de vos lettres des 1er et 8e du passé, par lesquelles vous diminuez un peu les espérances que vous m’aviez donné d’une prompte promotion. Je m’attendais bien à ce que vous m’en mandez, et pourtant je n’en conçois aucune inquiétude plus grande que celle que j’ai de la longueur de vos peines et de vos fatigues. Je suis résolu de les terminer bientôt, et, quoi qu’il arrive, de vous décharger d’une sollicitation si pénible et si importune. Tôt ou plus tard, vous ne serez plus à Rome que jusques aux Quatre-Temps, et cependant je vous prie, pour l’amour de moi, de prendre patience et d’attendre de mes nouvelles sur votre retour, que vous devez toujours faire appréhender, conformément à tout ce que je vous ai mandé ci-devant…….

Du surplus, il me semble que je n’ai rien à ajouter à tout ce que je vous ai écrit pour la conduite de mon affaire, que je tiens plus mai en la cour de Rome qu’en celle-ci, ne croyant pas que ma nomination soit sitôt révoquée, au moins selon les apparences, et de la manière dont je me gouverne.

« Je suis toujours fort bien auprès de M. le duc d’Orléans, lequel est présentement ami de M. le prince, mais à des conditions qui produiront peu de chose ou qui lui donneront bientôt sujet de s’en dégager. Il m’a fort pressé de me raccommoder avec M. le prince, sur les instances qui lui ont été faites par les gens qui sont ici ; mais, après avoir témoigné quelque résistance, il m’a donné un peu de relâche. Quoi qu’il en puisse arriver, je ne puis jamais prendre ce parti, et je veux faire voir à M. le duc d’Orléans qu’il est du bien de son service que j’en use de la sorte.

« Nous sommes assez en repos à Paris ; jusques à présent les affaires ne s’y disposent pas, à mon sens, à la guerre, si ce n’est que M. le prince y voulût venir, encore lui pourrait-il bien arriver