Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 23.djvu/365

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ressentiment de la part de son altesse royale sur les longueurs dont on a usé en une affaire qu’il passionnait[1] si fort pour le bien général de la France, et dont les délais et les remises ont donné temps au cardinal Mazarin de songer au retour et peut-être les biais de traverser ma nomination, qu’il a toujours considérée comme un obstacle et un empêchement formel à tous ses desseins. Vous fortifierez cet endroit des avis que vous donnent ceux qui sont auprès de Monsieur, de la pensée en laquelle vous direz qu’il est de vous rappeler en France, en cas que le pape ne fût pas en état de faire promptement la promotion, son altesse royale ne voulant pas que les sollicitations qu’il fait à Rome pour mes intérêts paraissent dans le public contredites par un ordre et une révocation de la cour qui pourrait faire croire que le cardinal Mazarin est ici plus puissant que lui. Voilà pour ce qui regarde M. le duc d’Orléans.

« Quant à moi, vous direz que je ne me suis engagé dans la poursuite du chapeau qu’après les assurances que sa sainteté m’a fait donner plusieurs fois de considérer promptement mes intérêts quand j’aurais la nomination de la cour ; que je n’ai poursuivi ce dessein et n’en ai souhaité l’exécution que pour servir le saint-siège et me fortifier contre le cardinal Mazarin ; que, le temps ayant rallumé dans l’esprit dudit cardinal l’espérance du retour et lui ayant donné le pouvoir de s’opposer à mes prétentions, je ne lairrai (laisserai) pas de rechercher, en qualité d’archevêque de Paris, toutes les occasions de servir l’église et le pape, et particulièrement dans les états-généraux, comme un des principaux députés du clergé.

« Essayez aussi de faire peur de la réunion de M. le prince avec le cardinal Mazarin, qui tous deux ensemble formeront, avec les troupes du roi, un puissant parti contre lequel j’aurais eu plus de subsistance avec le chapeau.

« Enfin voyez, par la connaissance que vous avez de l’humeur de ceux avec qui vous avez à traiter et de l’intrigue du pays, ce que vous devez ajouter ou diminuer en tout ce que je vous dis, dont je me rapporte entièrement à vous, sachant bien que, sur le plan que je vous trace, vous n’oublierez rien de ce qu’il faut pour mes intérêts. Soyez seulement averti que, pour des raisons que vous devinez assez, le secret de tout ceci doit demeurer entre le pape, le cardinal Pamfili et vous… Sans ce maudit retour du cardinal Mazarin, M. le prince était confondu ; il ne le sera peut-être pas moins étant d’accord avec lui… Ce que je vous ai dit de témoigner au pape sur mon sujet vous marque assez que je ne suis pas content. Vous lui devez dire adroitement et lui faire voir que je puis avoir des occasions de m’en ressentir… Quoique je vous mande de faire peur à

  1. Il faudrait lire : qui le passionnait si fort.