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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 août 1877.

S’il n’y avait point en jeu tant d’intérêts supérieurs, s’il ne s’agissait pas de la France, de sa sécurité, de son honneur et de son crédit dans le monde, si tout ce qui se passe depuis quelques semaines ne pouvait pas avoir en un de compte de périlleuses conséquences, le spectacle que nous avons sous les yeux, sans être bien nouveau, ne laisserait pas d’avoir ses côtés amusans. Une fois de plus nous assistons à cette éternelle représentation de l’esprit de parti avec ses forfanteries, ses puérilités, ses aveuglemens et ses artifices.

L’esprit de parti est dans tous les camps, nous n’en disconvenons pas : sous quelque drapeau qu’il s’abrite, il a cela de particulier qu’il ne voit que ce qui lui plaît et que sur toute chose il a son thème tracé d’avance. Si le chef de l’état part pour la Normandie, c’est convenu, les bulletins sont tout prêts avant que le cortège officiel soit en route ; réception spontanée et enthousiaste, disent les uns, réception silencieuse et froide, assurent les autres ! Là où ceux-ci n’ont entendu que des acclamations pour « le maréchal, » ceux-là n’ont distingué que des acclamations pour la république, et ce qui s’est passé pour l’excursion présidentielle à Cherbourg va recommencer sans doute à l’occasion du prochain voyage de M. le maréchal de Mac-Mahon à Bordeaux. S’il s’agit des élections, de ces élections au terme encore inconnu, il n’est point nécessaire d’attendre le scrutin, chacun est sûr de son fait : — les 363 reviendront au nombre de à00, dit-on au camp républicain ! Non, reprend l’optimisme des coalisés conservateurs, le gouvernement a la certitude d’enlever la majorité, de conquérir tout au moins cent nominations de plus qu’aux dernières élections ! On continue ainsi à tout propos, et même hors de propos, les uns renouvelant sans cesse le procès du 16 mai, les autres guerroyant contre tous les républicains, qu’ils appellent des radicaux Le respect de la vérité et du pays devient ce qu’il peut dans cet imbroglio où l’esprit de parti se donne libre carrière.