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gens qui n’ont pas les sentimens si soumis. Mon sens est que vous parliez au pape, en prenant congé de lui, avec tout le respect possible, mais avec autant de froideur que l’on en peut avoir avec un homme de cette sorte, c’est-à-dire avec autant qu’il en faut pour lui faire connaître que l’on voit de quelle manière on est traité, sans ajouter celle qui le pourrait aigrir tout à fait, ce qui ne serait pas politique, puisqu’il ne faut jamais ôter le retour à personne. Vous lui direz donc de la part de M. le duc d’Orléans, conformément à la lettre que vous en avez reçu, que vous ne croyez pas que ses instances lui soient agréables, puisqu’il ne lui a pas seulement fait encore réponse sur ce sujet par aucun bref, et vous lui dires de la mienne que je vous ai prié d’assurer sa sainteté que si, dans les affaires présentes de la France, je jouais le personnage tout simple d’un particulier, j’aurais attendu avec beaucoup de patience les effets de la bonne volonté qu’il m’a témoigné, mais que la fortune m’ayant mis en état que tous mes pas sont considérés dans les conjonctures présentes, et ma nomination sans effet ayant déjà porté préjudice à ma considération, je me sens obligé de laisser l’événement de la chose à la simple nomination du roi, sans paraître plus longtemps solliciteur de cette affaire. S’il vous parle du jansénisme, vous répondrez dans les termes avec lesquels j’ai écrit la lettre que je vous envoie sur ce sujet (la lettre qui suit), dont il n’est pas bon, à mon sens, que vous donniez des copies, mais que vous pouvez pourtant faire lire à beaucoup de gens. Faites paraître surtout à M. Chigi et faites-le entendre sous main au pape que vous voyez bien que je refuse cette déclaration, moins sur la matière que parce que je la considère comme un piège que l’on me veut tendre pour me désarmer.

« Témoignez à M. l’ambassadeur que vous voyez par ma dépêche que je ne crains pas de révocation et que toutes les bontés qu’il m’a témoigné sont un des motifs qui m’obligent autant à vous rappeler, parce que je suis persuadé qu’il me rendra tous les bons offices imaginables en votre absence comme en votre présence.

« Je suis si pressé par cet ordinaire que je n’écris à personne qu’à vous, et que je remets au prochain à vous envoyer des lettres que je veux écrire à M. l’ambassadeur, au duc de Bracciano et une à tous les autres qui m’ont rendu office à Rome, par lesquelles je leur veux rendre grâces des obligations que je leur ai. Vous leur direz, s’il vous plaît, en attendant, que vous les devez recevoir par un courrier extraordinaire que vous attendez de jour en jour.

« Affectez de faire paraître que je suis mieux que jamais dans l’esprit de M. le duc d’Orléans, ce qui est vrai en effet, et, par une adresse digne du pays où vous êtes, faites voir à Chigi et autres gens, comme je vous l’ai déjà dit, que le refus de la