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générale et la confusion. » Aveu précieux à retenir et que bien des révolutionnaires ont dû laisser échapper dans le secret de leur conscience ! Après la révolution du 4 septembre, à laquelle Gustave Chaudey avait applaudi, il fut nommé maire du IXe arrondissement ; n’ayant pas été réélu au mois de novembre, il fut attaché comme adjoint à la mairie de Paris. Il était à l’Hôtel de ville le 22 janvier, lorsque les émeutes s’y présentèrent précédés par deux députations. Les orateurs de celles-ci exigeaient la sortie en masse. Le commandant militaire répondit que toute la garde nationale serait prochainement appelée à combattre l’ennemi ; les orateurs répliquèrent : « C’est ça, on veut encore nous envoyer à la boucherie et faire massacrer le peuple ! » Peu d’instans après cet incident, la fusillade fut engagée par des hommes du 101e bataillon marchant sous les ordres de Sérizier : la place fut promptement déblayée par la garde mobile, à laquelle la gendarmerie vint bientôt se joindre. Cette tentative avortée d’insurrection, que Flourens avait conduite en sous-main, était comme une pointe aiguë dans le souvenir des triomphateurs du 18 mars. Force était restée à la loi, l’ordre n’avait été que momentanément troublé, le gouvernement de la défense nationale n’avait point été écroué à Mazas : c’étaient là trois crimes dont on accusait Gustave Chaudey. Celui-ci fut d’abord dénoncé dans le Père Duchêne : « Il y a par exemple le misérable Chaudey qui a joué un sale rôle dans cette affaire-là (22 janvier) et qui se balade encore dans Paris aussi tranquille qu’un petit Jean-Baptiste ; est-ce qu’on ne va pas bientôt décréter d’accusation ce j. f. là et lui faire connaître un peu le goût des pruneaux de six livres dont il nous a régalés dans le temps ? » Vermesch, rédacteur en chef de ce journal, a déclaré qu’il n’était pour rien dans cette délation ; on en a fait retomber la responsabilité sur un nommé Alphonse Humbert ; il nous est impossible d’émettre une opinion à cet égard, nous savons seulement que la dénonciation fut publiée page 8 du no 27 du Père Duchêne, en date du 22 germinal, an 79. Le soir même, 12 avril, Delescluze dit, en séance de la commune, à Raoul Rigault : « Je suis surpris que Chaudey ne soit pas arrêté. » Celui-ci l’était, le lendemain, par les soins d’un certain Pillotel, qui cinq jours plus tard, en homme pratique qu’il était, vint arrêter aussi 815 francs au domicile de Mme Chaudey. Des démarches très instantes et inutiles furent faites pour obtenir la liberté de ce prisonnier d’état. Un ami intime de Chaudey alla en parler à Raoul Rigault, qui répondit : « Entre Troppmann et Chaudey, je ne fais point de différence. »

On a dit qu’une haine secrète, motivée par des pièces de procédure compromettantes dont Chaudey avait eu connaissance en qualité d’avocat, avait poursuivi ce malheureux ; nous ne faisons que