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jolie ville et d’une station d’été des plus recherchées par les habitans de l’intérieur ; aujourd’hui il serait fort difficile de se rendre compte de ses mérites, tant la guerre, le bombardement, le séjour et le passage des armées, lui ont causé du dommage ; ses faubourgs sont dévastés, ses rues défoncées, ses maisons, son église, trouées par les bombes : seule sa plage lui reste, et cette magnifique situation en vue de la mer. Au surplus, en venant à Portugalete, mon but n’était pas d’y demeurer longtemps : j’avais hâte de visiter les mines fameuses des environs. Deux exploitations principales sont actuellement en activité : celle de Triano, appelée aussi de Somorrostro du nom de la vallée qui l’avoisine, — c’est elle qui fournit le minerai le plus estimé et le plus abondant, — celle de Galdámes, située plus avant dans l’intérieur et fort riche également ; des chemins de fer les relient, la première au Nervion, à l’endroit nommé le Désert, et la seconde à Sestao. De plus trois nouvelles lignes appartenant à des compagnies différentes et destinées à desservir les gisemens voisins sont en construction : les travaux, arrêtés quelque temps par la guerre, ont été repris sans retard ; toutes trois doivent aboutir au fleuve par Luchana ou les environs. Citons encore pour mémoire le tramway aérien du système Hodgson, où des wagonets roulent suspendus le long d’un câble de fer. Bref les moyens de transport sont calculés pour enlever chaque année de la mine plus de 2 millions de tonnes. Sur ce champ de bataille du travail et du progrès, l’Espagne, l’Allemagne, la France sont représentées ; mais c’est encore l’Angleterre qui tient le premier rang : quatre des compagnies sur six ont été créées par des fonds anglais en tout ou en partie. D’ailleurs, il faut bien le dire, ce développement subit de l’industrie minière n’aura pas été sans porter un certain désordre dans le pays. Autrefois, en vertu du fuero, chacun avait droit de puiser aux mines quand et comme il voulait, elles appartenaient de pleine autorité à leurs maîtres directs, particuliers ou municipes. Peu à peu, sous certains prétextes plus ou moins spécieux, l’état s’en est emparé pour les vendre ; il promettait bien aux possesseurs dont il usurpait les terrains un tant pour cent sur le prix, mais les indemnités convenues n’ont point été payées. De plus, aux termes de la loi nouvelle du 29 décembre 1868, il suffit qu’une personne, à tort ou à raison, dénonce la première votre propriété comme terrain minier, pour que par cela même elle soit autorisée à se la faire concéder. Sans doute la loi fait ici une distinction entre le sol, sur lequel le propriétaire conserve toujours ses droits, et le sous-sol, lieu de gisement des substances métallifères, qui en principe appartient à l’état, avec liberté pour lui de le conserver ou de l’aliéner. Mais, si jadis, à cause des moyens tout primitifs dont disposait