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savans géographes, d’une certaine importance économique, mais qui ne peut manquer de lui assurer bientôt un rôle très considérable dans l’industrie du monde. » Le fer se rencontre partout en Viscaye, et les endroits ne se comptent plus qui furent ou sont encore exploités ; mais les mines les plus importantes sont celles d’Ollargan, à l’est de Bilbao, et surtout celles de Triano, dans les Encartaciones, célèbres déjà du temps des Romains. Pline l’Ancien dit textuellement : « De tous les métaux, le minerai de fer est le plus abondant. Sur la côte de Cantabrie, il y a une montagne haute et escarpée, qui, chose incroyable à dire, est toute de cette matière. » En 1873, rien que sur ce point, près de 3,000 ouvriers étaient employés journellement aux travaux des mines, et la quantité du minerai extrait a dépassé 400,000 tonnes. Dès maintenant, on peut dire que Bilbao est destiné à devenir, bien avant Barcelone, pour le mouvement et l’importance du tonnage, le premier port de la Péninsule. C’est en effet l’exportation du minerai qui entre dans les chiffres du commerce bilbaïen pour la somme la plus élevée.

Il n’est pas de promenade plus agréable que celle de Bilbao à la mer, sur un de ces vapeurs si coquets qui, toutes les heures, se détachent du quai de l’Arenal, et vous emportent vers Portugalete. Le mouillage des navires, l’appareillage, les opérations multiples du chargement, le va-et-vient des petites barques qui aident au transport des marchandises et des passagers, tout cela met sur le fleuve un mouvement continu. Durant le parcours, on croise une foule de bâtimens, différens de couleur, de gréement et de pavillon, accotés les uns à la rive, les autres, par groupes de deux ou trois, ancrés dans le lit du fleuve, d’autres passant à pleines voiles ou à toute vapeur. Les rives des deux côtés s’allongent vertes et riantes, légèrement montueuses, coupées par de petits murs blancs qui tracent la limite des parcs et des jardins ; dans le fond, tout empanachées d’une lourde fumée noire qui fait en s’écartant une immense tache dans l’azur du ciel, surgissent hautes et noires les cheminées sans nombre de la fonderie du Désert. Enfin le fleuve s’élargit, les rives s’écartent à l’infini ; en face, un moutonnement du flot indique la présence de la barre ; voici à gauche Portugalete avec sa longue jetée, ses maisons en étage, et là-haut, perçant à l’horizon, reconnaissable à sa forme conique qui fait penser à un volcan éteint, la montagne de Sarantes. Cette montagne sert de guide aux marins en mer pour reconnaître l’entrée du port ; c’est elle qu’ils aperçoivent la première en rentrant au pays, souvent après des années d’absence, et, si le proverbe dit vrai, « le Sarantes à lui seul a fait verser plus de larmes de joie que l’Ibaizabal ne roule de gouttes d’eau dans son lit. »

J’avais beaucoup entendu parler de Portugalete comme d’une