Page:Revue des Deux Mondes - 1877 - tome 22.djvu/300

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

exercices, ne les aimaient pas. Le goût leur en vint pourtant sous l’empire, et ce fut surtout Donatien qui les leur fit agréer. Il construisit pour ces jeux ce grand cirque du champ de Mars dont la Piazxa Navona conserve encore la forme et le plan ; il aimait à les présider, revêtu du costume grec, les épaules couvertes d’un manteau de pourpre, avec une couronne d’or sur la tête. Il n’est donc pas surprenant qu’il ait voulu avoir un stade dans son palais où. il pût se donner pour lui seul et ses amis ce divertissement qu’au champ de Mars il partageait avec tous les Romains. Il lui plaisait sans doute d’essayer en compagnie de quelques connaisseurs le coureur rapide ou l’habile athlète qu’il devait plus tard montrer au peuple. Le lieu où se donnaient ces fêtes devait être fort élégant[1] : on a retrouvé l’hémicycle impérial, composé de deux salons placés l’un sur l’autre dont le plus élevé semble avoir été aussi le plus beau. Tout autour du cirque régnaient deux étages de portiques soutenus par des colonnes de marbre. On se figure l’aspect que ces lieux devaient présenter quand l’empereur était assis dans sa loge et que les courtisans, heureux de prendre leur part de ces distractions impériales, se pressaient sous les portiques.

C’est au-delà du stade de Domitien, à l’angle même de la colline, vers l’est et le midi, que Sévère bâtit son palais. La dépense dut en être très considérable : avant de construire le palais lui-même, il fallut, pour ainsi dire, faire le sol sur lequel il devait s’élever. Nous avons vu tout à l’heure qu’il s’abaisse en pentes douces jusqu’à la plaine ; on le releva par des substructions immenses qui se composaient d’arcades de pierre superposées. Ces substructions existent encore ; la terre qui les recouvrait ayant disparu, on aperçoit de tous les côtés ces arcades qui montent les unes sur les autres et forment entre elles des groupes étranges. Elles paraissent si hautes, elles frappent d’un tel étonnement celui qui les regarde des rues environnantes, qu’on leur a fait quelquefois l’honneur de les prendre pour le palais même des empereurs : elles n’en sont que les fondations et le sous-sol ; au-dessus d’elles était construit le palais de Sévère. Il en reste quelques murs encore solides, les plus hauts et les mieux conservés qu’on trouve au Palatin. L’un d’entre eux soutenait un magnifique escalier qui conduisait aux étages supérieurs. Mais de toutes ces ruines imposantes, rien n’égale en intérêt ce qui reste de la loge impériale sur le grand Cirque. Elle était attenante au palais même, en sorte que l’empereur assistait aux courses de chars et de chevaux sans sortir de chez lui. Elle se composait d’un salon fermé, où le prince et sa famille pouvaient prendre quelque

  1. Il existe, à la bibliothèque de l’École des Beaux-Arts, un intéressant essai de restauration du stade de Domitien, par M. Pascal, ancien pensionnaire da l’Académie de France à Rome.