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d’originalité, mais si l’on se reporte à l’époque dont nous parlons, si l’on tient compte de ce qu’étaient alors ces états nouveaux où le colon disputait le sol aux animaux féroces et aux Indiens, on conviendra que les journaux qui paraissaient dans ces villages naissans étaient bien les ancêtres du Frontier Index. Eux aussi étaient les fanaux mouvans qui précédaient et éclairaient la marche des pionniers et des colons qui, partis de l’Atlantique, ne devaient s’arrêter qu’aux rives de l’Océan-Pacifique.


III

La période comprise entre 1810 et 1820 est marquée aux États-Unis par un développement constant que ralentissent parfois, sans l’arrêter, les guerres avec les tribus indiennes, la rupture avec l’Angleterre, la bataille de la Nouvelle-Orléans, les dissensions intérieures qui aboutissent au compromis du Missouri, la crise financière, la guerre des banques. En 1802, le président Jefferson nous achète pour 80 millions la Louisiane. La presse est unanime pour approuver cet achat, qui inspirait aux deux parties contractantes des réflexions qu’il est utile de relever ici : « Nous sommes parvenus à un âge avancé, écrivait Monroe, négociateur du traité, mais nous n’avons pas vécu en vain, et ce traité est le plus grand service que nous ayons rendu à notre patrie. » Napoléon, de son côté, disait : « Cet accroissement de territoire consolide à jamais la puissance des États-Unis. J’ai suscité à l’Angleterre un rival sur les mers qui tôt ou tard abaissera son orgueil. »

L’épreuve ne devait pas tarder à se faire, mais les circonstances étaient peu favorables aux États-Unis, dont la marine naissante ne pouvait encore lutter avec celle de l’Angleterre. Les difficultés qui surgirent en 1807 et qui aboutirent à la guerre en 1812 trouvèrent l’opinion publique divisée. La presse se partagea en deux camps, dont l’un, organe du parti démocratique et représentant des états de l’ouest, voulait la guerre, et dont l’autre, écho des opinions des fédéralistes de la Nouvelle-Angleterre et notamment de Boston, la déclarait impolitique et désastreuse. Les premiers l’emportèrent. Le danger commun fit taire ces dissidences, et la presse, en surexcitant puissamment les passions patriotiques, apporta à l’administration un concours énergique et décisif. La bataille de la Nouvelle-Orléans, gagnée le 8 janvier 1815 parle général Andrew Jackson, et la prise, par la frégate américaine Constitution, de deux bâtimens de guerre anglais permirent aux États-Unis de négocier une paix honorable qui non-seulement consacrait à nouveau leur