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soit cher, un maître de conférence donnera l’enseignement général. Placés un peu plus près des étudians, ces maîtres connaîtront mieux leurs désirs. Ils auront encore une autre tâche. Dans aucune faculté, les leçons données du haut de la chaire ne suffisent : si, pour les sciences chimiques et physiques, il faut à la théorie joindre l’habitude des expériences, si en médecine la clinique est la moitié de l’enseignement, il n’est guère moins nécessaire d’habituer l’étudiant en droit à voir clair dans une question douteuse, ou l’étudiant en lettres à composer une dissertation ou à commenter un texte. Pour ces exercices pratiques, qui demandent du temps et causent souvent au professeur un notable surcroît de travail, le maître de conférence sera un précieux auxiliaire. On sait quel rôle capital ont pris en Allemagne depuis trente ans ces exercices pratiques; aux cours ordinaires viennent s’ajouter des conférences faites pour des élèves choisis, qui sont censés composer le « séminaire » historique, philologique, juridique.

Mais si nombreux que soient les maîtres de conférence nommés par l’état, ils ne suffiront pas encore aux intérêts divers et imprévus que l’université doit satisfaire. En effet, l’on ne peut demander à l’administration de salarier assez de maîtres de conférence pour qu’aucune lacune ne se trouve dans les programmes, ou pour que toute partie de l’enseignement qui menace de fléchir, que ce soit par la faute du professeur, ou à cause du développement excessif de la science, ou à cause du trop grand nombre des élevées, soit aussitôt renforcée. De là l’utilité d’une troisième sorte de maîtres qui entreprendront, en leur propre nom, de remplir les desiderata qui peuvent se produire et de pourvoir aux enseignemens non donnés par l’état. Ces maîtres, que nous appellerons les docteurs libres, et qui répondent aux privat-docenten de l’Allemagne, auront droit à une salle dans les bâtimens de l’université et à une place sur l’affiche des cours. Ils participeront dans une certaine mesure à l’élection des doyens et du sénat académique. Nous verrons tout à l’heure quelles garanties de savoir et de capacité l’état devra en retour exiger d’eux. Les docteurs libres auront le droit de se faire rétribuer par les étudians, d’après un taux uniforme, approuvé par le sénat académique, et proportionnel au nombre hebdomadaire des leçons. La rétribution sera versée par les étudians entre les mains du trésorier de l’université, qui l’inscrit à l’avoir du docteur. Le droit de faire des cours payans n’appartiendra d’ailleurs pas exclusivement aux docteurs libres : en sus des leçons réglementaires, les maîtres de conférence pourront faire des cours qui seront pareillement subventionnés par les élèves. Ce droit sera même étendu aux professeurs titulaires, à la condition qu’ils ne soient pas examinateurs