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on devra se borner à un très petit nombre; mais, d’autre part, si l’on se règle sur les vœux exprimés par les municipalités et en partie appuyés par des offres considérables, on sera conduit à en créer dans une assez grande quantité de villes. Laissons à l’administration le soin de décider une question pour laquelle elle possède seule les informations nécessaires. Nous souhaitons que l’organisation de ces universités ne se fasse pas simultanément sur trop de points du territoire, mais qu’elle soit échelonnée sur une série d’années, de sorte qu’on puisse mettre à profit l’expérience acquise. On n’essaie bien les choses nouvelles qu’en petit : les réformes étendues à toute une administration sont presque toujours destinées à échouer.

Quelques personnes ont pensé que la conséquence nécessaire de ces nouvelles créations était l’abolition de ce qu’on appelle les petites facultés, c’est-à-dire de celles qui ne seraient pas complétées et érigées en universités. Ainsi dans un projet de loi soumis en 1873 à l’assemblée nationale par M. Paul Bert, on lit : « Article 1er. Il est institué dans chacune des villes suivantes : Paris, Bordeaux, Lyon, Montpellier, Nantes, une université... Art. 3. Sont supprimées les facultés des lettres et des sciences de Besançon, de Clermont, de Grenoble, de Poitiers, de Rennes; les facultés de droit de Grenoble, de Poitiers et de Rennes; les écoles préparatoires de médecine d’Alger, d’Amiens, d’Angers, d’Arras, de Besançon, de Bordeaux, de Clermont, de Grenoble, de Limoges, de Lyon, de Nantes, de Poitiers, de Reims, de Rennes, de Rouen, de Tours. » Je ne crois pas que ces suppressions doivent être approuvées. Quels que soient les avantages des grands centres d’instruction, ne méprisons point les petits, qui leur préparent des élèves et des professeurs. Après un an, deux ans, l’étudiant de Grenoble ira chercher à Lyon un plus vaste théâtre; le jeune professeur qui aurait craint de s’essayer à côté des maîtres de la science aura d’abord dans une petite faculté un auditoire moins exigeant. Remarquons d’ailleurs que quinze universités, si dès à présent les ressources du pays en hommes et en argent y suffisaient, n’auraient rien d’excessif : l’Allemagne, — l’Autriche non comprise, — en possède vingt. Il faut donc considérer les petites facultés comme des universités en voie de formation, qui, au fur et à mesure des besoins, se compléteront et prendront les organes qui leur manquent. Ajoutons que si l’on se livrait à ces exécutions, dans les bâtimens devenus vides, nous verrions bientôt, à la faveur du mécontentement des municipalités, s’installer le personnel des universités libres.

Nous retournons auprès des grands centres pour continuer à en observer le développement. L’université sera reconnue personne