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généralement en retournant d’Amérique en Europe. La mâture est construite de façon à pouvoir se rabattre en Seine. Dans son ensemble, le bateau est marin, c’est-à-dire apte à tenir la haute mer avec sa cargaison par les plus forts coups de vent de l’Atlantique, si fertile en tempêtes. Aujourd’hui que ce n’est plus 2 mètres, mais bien 3 mètres de tirant d’eau que l’état nous promet pour la navigation de la Basse-Seine, il serait temps que des projets comme ceux de M. Leclert passassent enfin des spéculations de la théorie à celles de la pratique. L’accès direct à la mer est pour un pays un élément de richesse certain. Quelle source de prospérité l’Angleterre n’emprunte-t-elle pas à ses fleuves ! Londres est sur la Tamise, Bristol sur la Severn, Liverpool sur la Mersey, Glascow sur la Clyde, et Londres et Liverpool sont les deux premiers ports du globe. Dans l’antiquité, Rome fut redevable au Tibre de son importance commerciale. Ninive et Babylone étaient sur le Tigre et l’Euphrate comme le Caire est sur le Nil, Calcutta sur le Gange, New-York sur l’Hudson, la Nouvelle-Orléans sur le Mississipi, Québec et Montréal sur le Saint-Laurent, Anvers sur l’Escaut. En France, où la nature a été en cela moins généreuse, où elle a plus parcimonieusement alimenté les cours d’eau, où elle les a moins heureusement dessinés, l’homme doit relever ceux-ci de l’espèce d’infériorité où ils sont. L’amélioration de la Seine sera une première conquête. D’autres conquêtes viendront ensuite et comme d’elles-mêmes, avec l’amélioration da Rhône, de la Garonne, de la Loire. N’oublions pas que Paris et Rouen, Lyon et Arles, Bordeaux, Nantes, doivent leur première prospérité à leur situation sur des cours d’eau. Il faut donc faire pour ceux-ci tout ce que la nature a oublié de faire, et comment hésiterait-on un instant lorsqu’on est armé de tous les outils merveilleux que la science a mis aujourd’hui à la disposition de l’homme?

Nous ne voulons pas suivre M. Krantz dans tous les détails de ses intéressans rapports, et après avoir examiné avec lui ce qui a trait à la navigation de la Seine et d’une partie des canaux du nord, du centre et de l’est, ainsi qu’à la navigation de la Saône et du Rhône, reprendre les mêmes études sur d’autres points. Partout l’habile ingénieur a porté le même esprit de critique féconde, dit franchement ce qui manquait, ce qu’il fallait faire pour compléter chaque portion du réseau. Il a su rendre attachante une lecture qu’on croirait aride, et l’on serait ici tenté de le suivre dans le bassin du golfe de Gascogne et sur le canal si heureusement projeté du Maransin. Maris sinus, qui doit donner la vie aux landes sableuses et stériles, ou bien d’étudier avec lui la navigation du bassin de la Garonne et du canal du Midi, ou celle du bassin de la Loire, qu’il