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3 mètres, et à tous nos canaux, rivières et fleuves intérieurs un de 2 mètres au moins. De cette façon on pourra aller sans rompre charge de la Manche à la Méditerranée, et l’on fera réellement de Paris ce que demande depuis tant d’années l’instinct populaire : un port de mer.


III, — PARIS PORT DE MER.

Paris port de mer, c’est le rêve de tous les Parisiens et de beaucoup d’ingénieurs, surtout depuis le commencement du siècle. On peut plaisanter de l’idée, mais elle fera son chemin. Nous n’entendons point proposer ici d’amener la mer à Paris par un canal ouvert au milieu des terres, comme l’ont projeté quelques rêveurs, qui ont présenté à ce propos des dessins et des devis que nous croyons au-dessous du vrai. Bien qu’aujourd’hui aucune limite ne semble imposée à l’audace humaine en matière de travaux publics, il est cependant des barrières devant lesquelles il faut s’arrêter; mais faire de Paris un port de rivière important, en relation directe et continue avec la mer, en un mot, le centre d’un puissant cabotage intérieur et extérieur, il n’y a là rien d’impossible, et tout nous y convie. Le moment propice semble arrivé, et déjà quelques hommes d’initiative ont pris hardiment les devans.

Qui n’a pas vu maintes fois, dans ces dernières années, ancré au port du Louvre, ce petit navire à voile et à vapeur, du port de 200 tonnes, qui faisait régulièrement les voyages de France au Japon, de Paris à Yokohama? Cet intéressant steamer s’est perdu en mer il y a trois ans. D’autres, plus heureux, vont toujours de Paris à Londres par la Seine, la Manche, la Mer du Nord et la Tamise, « En charge pour Londres, » telle est l’enseigne qu’ils portent orgueilleusement au haut de leur grand mât, quand ils sont ancrés à Paris. A l’avenir, ces exemples ne seront plus isolés. En 1866, l’état avait projeté de porter à 2 mètres le tirant d’eau de la Seine entre Paris et Rouen. Il fallait bien faire quelque chose pour nos voies navigables, surtout après la promulgation du traité de commerce de 1860, où l’on avait reconnu que nos transports intérieurs étaient gênés par une foule d’obstacles, et que notre outillage (c’est le mot dont on se servait) n’avait pas atteint le degré de perfectionnement voulu. Sur l’avis que le tirant d’eau de la Seine allait être porté à 2 mètres, les chercheurs s’étaient mis en campagne. Quelques-uns n’avaient pas attendu ce moment. Déjà, en 1855, M. Belgrand, alors ingénieur en chef du service hydraulique sur la Basse-Seine, avait présenté une étude en vue de l’établissement sur le